Établissement des priorités en délibération – module d'AC des IRSC

par Sandy Campbell

Juin 2010

Toute correspondance destinée à l'auteur peut être envoyée à l'adresse suivante : sandy.campbell@gmail.com. Je tiens à remercier Jonathan Lomas, Lydia Kapiriri et Pierre Ongolo-Zolo pour les discussions que nous avons eues sur les versions précédentes du présent module et leurs observations.

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Table des matières


Section 1 : Introduction

1. Application des connaissances

En théorie, les chercheurs et les responsables des politiques poursuivent un objectif commun : soulager les maux de la société et résoudre les problèmes de la collectivité. En pratique, les chercheurs et les responsables des politiques se trouvent souvent en opposition – on parle alors de « l'écart entre savoir et faire », il y a divergence entre ce que la société sait et ce qu'elle fait.1Cherchant à découvrir la vérité scientifique, les chercheurs ont souvent l'impression que les responsables des politiques sont incapables de la comprendre ou de l'appliquer à leur travail. Cherchant à obtenir un consensus, les responsables des politiques voient les chercheurs simplement comme un autre groupe cherchant à influer sur leurs décisions. (Choi et al. 2005).2 Il est rare qu'il y ait convergence entre la vision et les besoins de ces deux groupes.

Depuis le Sommet ministériel de Mexico en 2004, le concept d'application des connaissances (AC) émerge comme une approche de pointe pour rétrécir l'écart entre la recherche et les politiques.3 L'AC est souvent considérée à tort comme une technique pour appliquer les résultats de la recherche directement aux politiques – ou présenter la recherche « dans un langage approprié » qui assure son application, tout comme une pièce de monnaie permet d'actionner un billard électrique – il est cependant plus approprié de l'imaginer comme une rencontre et une union de la recherche et des processus politiques.4Cette définition de l'AC ramène aux principes fondamentaux de la recherche et des processus politiques et les aborde comme deux entités non linéaires, très complexes et en constante évolution qui sont souvent obscures pour les non-initiés et dont les racines s'étendent au-delà d'un produit particulier (rapport de recherche; énoncé de politique) ou d'un événement isolé (Lomas 1997).

Le but ultime de l'AC, en unissant ces processus, est de faire en sorte qu'ils aient une influence réciproque. Plus le degré de compréhension mutuelle sera grand – plus les chercheurs comprendront les politiques et plus les responsables des politiques comprendront la recherche – plus il y aura de chances que la recherche oriente les politiques et que les politiques orientent la recherche.5 Par-dessus tout, l'AC prévoit un cycle, en mouvement constant, de recherche orientée par les politiques menant à des politiques fondées sur des données probantes qui, en retour, favorisent plus de recherche orientée sur les politiques. Cela se réalise grâce à des relations solides, au dialogue ouvert, à la confiance, au respect et à l'atteinte d'objectifs communs (Ginsburg et al. 2007, Innvaer et al. 2002, Jackson-Bowers et al. 2006, Dobbins et al. 2007, Golden-Biddle et al. 2003). L'AC est essentiellement un processus social.

2. Établissement des priorités

L'établissement des priorités représente la première étape de ce cycle d'AC. En définissant les besoins en matière de politiques et les options de recherche, les processus d'établissements des priorités unissent les responsables des politiques et les chercheurs avant même que la recherche commence. Outil singulier d'application des connaissances, les processus d'établissement des priorités nous amènent à nous demander quels sont les besoins des responsables des politiques en matière de recherche et comment ces besoins peuvent orienter et déterminer le programme de recherche.

Il y a deux principaux types de processus d'établissement des priorités : établissement des priorités pour la recherche (déterminer, examiner et classer des sujets de recherche particuliers ou des questions de recherche) et l'établissement de priorités pour la prestation de services (déterminer, soupeser et classer les interventions offertes par un établissement de soins de santé – aussi appelé « rationnement » ou établissement des priorités relatives aux interventions). Beaucoup plus de travail a été fait en ce qui concerne l'établissement des priorités pour la prestation de services et on a plus d'expérience à ce sujet; la documentation reflète très bien ce déséquilibre. Même s'il y a un chevauchement important entre ces deux types de processus, ils sont très distincts, et la documentation révèle que, jusqu'à maintenant, on a fait peu d'efforts pour examiner ces synergies. Bien que nous ayons inclus dans le présent texte, beaucoup de réflexions, d'éléments logiques et d'exemples tirés de la documentation sur l'établissement de priorités pour la prestation de services, nous nous intéressons principalement à l'établissement de priorités pour la recherche – à l'échelle nationale (par exemple, établissement de priorités pour un programme de recherche national) et sur un thème ou un problème précis (par exemple, hiérarchiser et classer les différents enjeux ou questions de recherche) – en mettant davantage l'accent sur les pays à revenu faible et intermédiaire. Le présent module ne réduit pas l'écart dans la documentation sur ces deux processus d'établissement de priorités, mais tente d'adapter à l'établissement de priorités pour la recherche des modèles d'établissement des priorités pour la prestation de services (p.ex. le modèle Programme Budgeting and Marginal Analysis [ budgétisation des programmes et analyse marginale].)

Peu importe le type de priorités, l'établissement de priorités est en soi un acte philosophique et économique. Un acte philosophique en raison des questions qu'il soulève – comment une société décide-t-elle que des sujets sont urgents et pertinents et nécessitent davantage de recherche? – un acte économique, car il peut guider les investisseurs – comment une société peut-elle adapter ses ressources financières à ses besoins en connaissances? En définitive, l'établissement de priorités est un acte politique. Même l'expression – établissement des priorités – est porteuse d'une finalité politique rigide : cela suppose que l'on a évalué les faiblesses actuelles de la société, prévu ses besoins futurs et décidé de ce qui devait être fait, dans quel ordre et dans quel sens. Dans la plupart des sociétés, ce type de prise de décisions est un processus de très haut niveau qu'un représentant élu (un ministre de la Santé, par exemple) peut voir comme son propre domaine de compétences distinct.6 Peu importe dans quelle mesure un processus d'établissement de priorités se veut représentatif ou inclusif, le mécanisme permettant d'établir où et comment les besoins d'une société sont reconnus et comment ses ressources sont allouées est certainement un acte politique. C'est pourquoi le terme « établissement des priorités » doit être repensé. Tout au long du présent module, nous soutenons que ce qui est important c'est moins l'établissement de priorités comme tel (la reconnaissance et la détermination) et davantage la délibération entourant ces priorités (rencontre d'un groupe inclusif et représentatif pour discuter des besoins de la collectivité). Finalement, c'est le processus plus que le produit qui compte (OMS 2003). Il est possible que le dialogue ne permette pas de résoudre un problème ou d'établir des priorités réelles, mais il permet d'établir les relations sociales, la confiance et les interactions essentielles à l'AC et à tout système de santé.7 La reconnaissance des priorités et la considération de ces dernières sont au coeur du débat. Bien que nous utilisions le terme « établissement des priorités » tout au long du présent module, conformément à la terminologie acceptée, le terme « reconnaissance des priorités » décrirait mieux l'esprit de délibération et d'interaction de ce processus.

Dans sa forme interprétative idéale, l'établissement de priorités choisit les bonnes personnes pour faire un remue-méninges sur les bons enjeux afin de déterminer les priorités d'une société, d'un système ou d'un établissement.8 Il s'agit d'un processus transparent, juste, légitime et responsable conçu pour orienter les décisions, un moyen rationnel de déterminer comment les ressources sont investies pour répondre aux besoins de la société et guider les chercheurs sur des sujets « prioritaires et d'intérêt national » (Lenaway et al. 2006)9. Dans de telles dynamiques politiques et philosophiques, les approches pour l'établissement de priorités, les exercices et les processus sont nombreux et différents. Ces approches se distinguent en fonction du niveau (mondial, national, institutionnel), de la perspective d'ensemble (priorités de recherche pour le secteur de la santé; recherche sur des enjeux particuliers; définition de questions de recherche précises), de l'équilibre entre les approches techniques et interprétatives et de la participation des intervenants (Ranson et Bennett 2009). Il s'agit d'un processus complexe fondé sur des valeurs.

Le cadre de Daniels et Sabin (1998, 2000, 2002, 2008) fournit de l'information sur l'évaluation de la complexité éthique de l'établissement des priorités, et est de loin le plus cité. Leur cadre intitulé Accountability for Reasonableness (AFR) [responsabilité du caractère raisonnable] pour l'établissement de priorités décrit un « processus juste » qui permet aux intervenants de déterminer la légitimité, l'impartialité et la spécificité contextuelle des valeurs et des priorités qui doivent se combiner et, ultimement, orienter les décisions. Le cadre AFR établit une base morale qui met l'accent sur les principes de la délibération démocratique (Bruni et al. 2007; Kapiriri et Martin, 2007). Le cadre décrit quatre conditions nécessaires à tout processus d'établissement des priorités :

  • il doit être pertinent, c'est-à-dire convenir au contexte local conformément aux critères acceptés;
  • les décisions qui en découlent – et les raisons les justifiant – doivent être publicisées;
  • il doit inclure des mécanismes d'appel pour remettre en question, revoir et infirmer des décisions;
  • les dirigeants doivent être en mesure de faire respecter ces trois conditions.10

Le cadre AFR s'appuie sur des principes de justice sociale et, comme tel, il décrit des « valeurs de base » idéalisées pour les processus d'établissement des priorités (équitable, juste, délibérant, légitime, transparent, responsable, réalisable). Toutefois, comme l'expliquent Sibbald et al. (2009) puisque les processus d'établissement des priorités dépendent d'une décision entre ces valeurs, cela prépare le terrain pour les conflits puisque les intervenants seront fondamentalement et nécessairement en désaccord sur l'importance de différentes valeurs. Et c'est précisément en raison de cette adaptabilité constante liée au contexte, qu'il ne peut y avoir d'approche normative (Menon, Stafinski et Martin 2007), ni d'entente sur les éléments requis pour un processus fructueux – malgré le désir de certains auteurs de trouver un algorithme pouvant être reproduit et qui permettrait de classer et de soupeser les priorités dans toute situation donnée (Rudan et al. 2007a, Baltussen et Niessen 2006).11 Bien que certains processus d'établissement des priorités fassent appel à un jugement relativement simple sur la question de savoir si un enjeu ou une thèse favorise l'égalité des possibilités pour une population donnée (Hasman et Holm 2005), de nombreux autres processus génèrent plus de questions que de réponses.

Puisque les valeurs sont particulières au contexte, le choix de critères pour un exercice spécifique d'établissement des priorités est une étape importante (groupe de travail 2000; COHRED 2006). Il y a de nombreuses façons de déterminer des critères : on peut considérer comment une question donnée correspond à une liste de concepts philosophiques ou répondre de manière dite realpolitik aux désirs de ceux qui détiennent le pouvoir et l'influence (Rudan et al. 2007a; Baltussen et Niessen 2006). En général, cependant, il semble y avoir une série de critères qui sont extrêmement utiles et utilisés, soit pour déterminer un programme de recherche ou classer des questions contradictoires. Ces critères demandent que l'on porte attention aux points suivants :

  • ampleur, pertinence et urgence – la recherche sera-t-elle nécessaire d'ici les trois ou cinq prochaines années? (El-Jardali 2010; groupe de travail 2000). L'enjeu actuel sera-t-il une priorité dans cinq ans? (Alliance pour la recherche sur les politiques et les systèmes de santé 2009);
  • applicabilité, résultats attendus, coûts abordables, viabilité (Rudan et al. 2007a)12
  • potentiel maximal de réduire le fardeau de la maladie équitablement (Rudan et al. 2007a; Baltussen et Niessen 2006);
  • originalité – la question a-t-elle déjà fait l'objet de recherche ou existe-t-il une base de connaissances? (El-Jardali 2010, groupe de travail 2000);
  • capacité de recherche et faisabilité : avons-nous les compétences pour faire la recherche? Est-ce faisable du point de vue financier, technique, socioculturel et éthique? (groupe de travail 2000; COHRED 2006; Rudan et al. 2008);
  • pertinence sur le plan des politiques (El-Jardali 2010);
  • répercussions attendues de la recherche – les répercussions seront-elles plus grandes que les coûts relatifs? (COHRED 2006).13

3. Établissement de priorités et les « bonnes personnes »

Indépendamment des critères, les priorités retenues dépendent des personnes consultées (Commission sur la recherche en santé au service du développement 1990). Les priorités des occupants de taudis sont différentes de celles des médecins (Sitthi-amorn 1989 cité dans Lomas et al. 2003) et, généralement, les idées des chercheurs diffèrent de celles des responsables des politiques. Mais qu'en est-il des besoins et des préférences des autres intervenants, notamment les organismes de financement, les professionnels de la santé, les « bureaucrates non spécialisés » au sein du système de santé, de la société civile et/ou du secteur privé?14 Selon de nombreux auteurs, c'est la participation même d'un groupe inclusif d'intervenants qui confirme l'attrait de l'établissement des priorités en tant que moyen pour établir et enrichir la démocratie (Charles et DeMaio, 1993; Abelson et al., 2003; Bruni et al. 2007; Bruni et al. 2008; Mshana et al. 2007; Martin, Abelson et Singer 2002). La participation d'un grand nombre d'intervenants confère la « légitimité et l'impartialité » (Bruni et al. 2008), évidence d'une société qui discute ouvertement et fait avancer des valeurs fondées sur la justice sociale, nécessaires à un système de santé solide, tout en permettant aux responsables des politiques d'évaluer si leurs perceptions des besoins de leurs commettants sont exactes (Smith et al. 2009).

Trouver un équilibre entre les différentes voix qui se font entendre au cours du processus d'établissement des priorités constitue un certain défi. La plupart des documents sur le sujet mettent l'accent sur le rôle du grand public (groupe de travail 2000) : on se demande si les opinions du public ont été récupérées par les « professionnels » (Abelson et al. 2003), étouffées par l'ardeur de lobbyistes (Teng et al. 2007) ou ignorées par les responsables des politiques qui détiennent le pouvoir réel (Wait et Nolte, 2006, Rudan et al. 2007a). La documentation sur l'établissement des priorités pour la prestation de services traite beaucoup plus de la participation du public puisque le public est en fait le principal destinataire de ces services et qu'il a par conséquent droit de regard sur la façon dont ces services sont hiérarchisés et finalement offerts. Toutefois, lorsqu'il s'agit d'établir des priorités de recherche, le public peut être représenté plus efficacement par des organisations de la société civile ou des entités mondiales (p. ex. OMS, UNICEF) qui ont l'expertise et l'expérience requises en recherche et par le milieu de la recherche qui peut apporter une contribution significative en éclairant les aspects souvent techniques des délibérations. Il ne s'agit pas de dévaloriser ou d'ignorer la voix du public, mais de reconnaître les spécialisations inhérentes à la recherche en santé ainsi que la formation nécessaire pour reconnaître et analyser les écarts dans les connaissances, les besoins et les priorités. Toutefois, une telle spécialisation des enjeux nécessite une attention encore plus diligente pour atteindre un équilibre – puisque comme le font observer Kapiriri et al. (2007), les valeurs et les critères qui importent aux scientifiques et aux experts techniques peuvent être très différents des valeurs et des critères des autres intervenants concernés.

4. Établissement des priorités en tant que dialogue délibérant

D'un point de vue théorique, le concept de dialogue délibérant offre plusieurs moyens pour faire participer de nombreux intervenants à tout processus de prise de décisions et trouver un équilibre entre des opinions, des valeurs, des besoins et des critères différents. Dans le présent document, le « dialogue délibérant » est défini comme le processus d'une discussion collective et procédurale où un groupe inclusif et représentatif d'intervenants examinent des faits selon de multiples perspectives, discutent les uns avec les autres afin de porter un jugement critique sur les options et, grâce à une discussion bien argumentée, raffinent et élargissent leurs perspectives, opinions et compréhensions.15 Un dialogue délibérant crée une signification commune et une compréhension partagée (Franco 2006), un « outil de structuration de problème » unique et efficace (McDonald, Bammer et Deane 2009) qui représente l'âme de la démocratie même (Dryzek 2000). Contrairement à tout autre mécanisme, le dialogue délibérant ajoute une crédibilité, à la fois scientifique et sociale, au processus de prise de décisions, puisqu'il unit les personnes qui seront affectées par les futures décisions et leur donne les moyens d'agir (FCRSS 2006). Le dialogue délibérant peut ouvrir de nouveaux horizons favorisant la compréhension, surtout pour les personnes dont les opinions ne sont pas entièrement formées ou éclairées (London 2005).

L'objet du dialogue délibérant n'est pas de résoudre les problèmes (Lavis 2009a), mais plutôt de favoriser une discussion ouverte sur la nature du problème comme tel, de tenter de révéler la vraie complexité du problème (Abelson et al. 2003), ou de le situer au sein de son plus grand cadre systémique. Bref, le dialogue délibérant n'est pas une fin en soi, mais plutôt une étape du plus long processus de la prise de décisions – tout comme l'établissement de priorités est simplement une étape dans un processus beaucoup plus long qui consiste à créer et à appliquer des connaissances tenant compte des utilisateurs.

Selon la documentation sur les dialogues délibérants multilatéraux, il faut considérer attentivement comment chaque intervenant est choisi et comment chaque intervenant fonctionne réellement dans le dialogue. De ces deux éléments, il existe peu de données sur ce qui est efficace dans le choix des participants (Abelson et al. 2007). Dans leur typologie des mécanismes d'engagement public, Rowe et Frewer (2005) établissent deux divisions approximatives entre les dialogues pour lesquels il n'y a aucun contrôle quant au choix des participants (audiences publiques, cercles d'études, tribunes téléphoniques, forums ouverts, assemblées publiques – où les personnes prennent l'initiative de participer) et les dialogues où on détermine dans une certaine mesure qui participera (sondages d'opinion, documents de consultation, groupes ou panels de citoyens, conférences consensuelles, groupes de travail, cellules de planification).16

Toutefois, au-delà des descriptions de ces types de dialogue et des études de cas à leur sujet, il y a très peu de données sur ce qui est efficace dans des processus multilatéraux, y compris les répercussions que les processus délibérants ont sur les intervenants, les décideurs et la prise de décisions; ou sur la façon dont ces processus sont façonnés et construits par les différents contextes dans lesquels ils sont mis en oeuvre (Abelson et al. 2007).17

Il existe un écart de données similaire en ce qui a trait à la fonction des intervenants dans le dialogue délibérant. Si tous les intervenants concernés participent à un dialogue délibérant, ont-ils tous la même capacité de contribuer? Étant donné que le coeur d'un exercice d'établissement des priorités est fondamentalement technique, comment le dialogue délibérant s'accommode-t-il des différents niveaux d'expertise? De toute évidence, il y a beaucoup d'éléments à comprendre et à évaluer, particulièrement dans l'examen des liens entre les processus d'établissement des priorités et la prise de décisions (Smith et al. 2009) et entre la participation des intervenants et les types de priorités définies (Ranson et Bennett 2009). Abelson et al. (2003) suggèrent quatre composantes pour l'évaluation de tout processus de délibération, et que nous pouvons certainement proposer (avec le cadre AFR) pour l'évaluation du processus d'établissement des priorités. Voici ces composantes : la représentation (les participants représentent quel groupe démographique, quelle région géographique ou quelle affiliation politique?), les procédures (les procédures entourant le dialogue étaient-elles ouvertes, raisonnables, comprises, adaptées, légitimes et justes?), l'information (quelle information a été choisie, présentée et interprétée?), et les résultats (a-t-on tenu compte de l'opinion des intervenants dans le processus de prise de décisions?).

Dans la section 3 du présent module, nous présentons de nouvelles façons de trouver et de choisir les « bons » intervenants; dans les sections 2 et 3, nous abordons des moyens de les faire participer au dialogue, en observant les différentes fonctions que chacun peut assumer.

5. Processus d'établissement des priorités à l'échelle nationale

Le présent module porte principalement sur l'établissement des priorités à l'échelle nationale, particulièrement en tant que fonction d'un système national de recherche en santé dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Bien que la documentation sur le sujet soit relativement peu abondante, on constate néanmoins un grand enthousiasme à l'échelle mondiale pour la création de processus d'établissement des priorités dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Ce courant s'inscrit dans un système global de gouvernance et de gestion pour la recherche en santé, reconnaissant dans une certaine mesure la grande valeur de la recherche pour régler les problèmes des pays à revenu faible et intermédiaire et la nécessité de cibler cette recherche avec le plus de précision possible (Ghaffar et al. 2004, Nuyens 2007). Malheureusement, la documentation révèle peu de choses sur les processus d'établissement des priorités dans les pays à revenu faible et intermédiaire, mettant surtout l'accent sur les nombreuses difficultés entourant la mise en oeuvre de tout processus d'établissement des priorités. Parmi ces difficultés, mentionnons : le manque général d'information; le manque de liens entre ceux qui agissent et ceux qui devraient établir les priorités et entre les valeurs qui sont à la base de l'établissement des priorités et celles qui devraient l'être (Kapiriri and Martin 2007); comment l'établissement de priorités à l'échelle nationale pourrait guider les niveaux infranationaux et comment ces niveaux infranationaux pourraient adapter les priorités nationales à leurs propres besoins (Nuyens 2007); comment le processus peut-il influer sur les priorités définies (Makundi, Kapiriri and Norheim 2007); comment faire en sorte que l'établissement des priorités ne soit plus la chasse gardée des chercheurs et concerne un plus grand nombre d'intervenants (Kapiriri et al. 2007, Rudan et al. 2007a, Rudan et al. 2007b, Tomlinson et al. 2007); comment amener la discussion au-delà des questions entourant certaines maladies pour aborder des enjeux systémiques (el-Jardali, 2010, Walker et al. 2009); comment aller au-delà des simples analyses de rapport coût-efficacité qui dominent depuis longtemps les initiatives d'établissements des priorités dans les pays à revenu faible et intermédiaire (Mshana et al. 2007). Toutes ces difficultés sont bien sûr marquées par les établissements gouvernementaux souvent trop faibles pour prendre des décisions viables et applicables – ou considérer en appeler de ces décisions – et qui subissent souvent des pressions réelles et considérables de la part de bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux qui veulent les convaincre d'accepter leur propre perception des priorités.

Aux préoccupations concernant les pays à revenu faible et intermédiaire s'ajoute une difficulté additionnelle : tenir compte des opinions et des voix des nombreux intervenants afin que le processus d'établissement des priorités soit « juste et légitime ». Le groupe de travail (2000) suggère que des modèles séquentiels de consultation, d'analyse et d'établissement des priorités au niveau des communautés et des districts ainsi que le regroupement et la synthèse des résultats à l'échelle provinciale et nationale soient répétés plusieurs fois afin d'atteindre un consensus. Toutefois, malgré les règles des nombreuses réformes de la santé dans les pays à revenu faible et intermédiaire pour favoriser un processus participatif et multilatéral en ce qui a trait aux politiques en santé, ce type de participation dépend du désir véritable des décideurs de céder une partie de leur pouvoir (Wait et Nolte, 2006), désir plus facile à décrire dans un document qu'à concrétiser dans les faits. Comme Nuyens (2007) le fait observer, les stratégies et les méthodes nécessaires pour arriver à un processus participatif n'ont pas été élaborées ni mises oeuvre de façon systématique. Il n'y a pas d'ensemble de connaissances précisant comment et quand les divers intervenants devraient participer ou quelles devraient être leurs fonctions et responsabilités – l'établissement des priorités est souvent considéré comme un événement isolé et unique ayant très peu d'impact sur les autres composantes essentielles pour construire un système de recherche en santé et ayant peu de relations avec celles-ci.

En appliquant le cadre AFR à l'Ouganda, à la Norvège et au Canada, Kapiriri, Norheim et Martin (2007) n'ont découvert aucun mécanisme évident pour assurer la publicité, la pertinence ou les révisions des processus d'établissement des priorités, et aucun leadership apparent pour assurer l'impartialité du processus. Dans le même ordre d'idées, l'étude réalisée en 2008 par Sabik et Lie sur les processus nationaux dans les Pays-Bas, la Suède, la Nouvelle-Zélande, l'Orégon, le RoyaumeUni, le Danemark et la Norvège révèle que l'acte d'établir des priorités a un effet négligeable sur les enjeux réels qui ont été hiérarchisés. Comme d'autres chercheurs, ils concluent que les processus d'établissement des priorités à l'échelle nationale – indépendamment du revenu du pays – nécessitent de solides compétences en prise de décisions pour déterminer, surveiller et appliquer ce qui est (ou n'est pas) ultérieurement mis en place (Sabik et Lie 2008, Peacock et al. 2006, Rudan et al. 2008) et faire en sorte que les bons intervenants participent à la discussion.

Malgré le manque de données probantes ou d'évaluations à l'échelle nationale, certains auteurs recommandent fortement une marche à suivre. Ces recommandations sont variées : elles vont de la création par les pays de groupes consultatifs formés d'intervenants clés qui ont d'abord été formés sur les principes de l'établissement des priorités et peuvent ensuite apporter leur aide pour l'exécution du processus (Peacock et al. 2006) à la mise au point d'un algorithme ou d'un modèle pour l'établissement de priorités pouvant être adapté ou copié en toute sécurité d'un pays à l'autre (Rudan et al. 2007a). À l'heure actuelle, la contribution qui est probablement la plus importante dans ce domaine est la documentation complète des expériences menées par des pays à revenu faible et intermédiaire dans l'établissement de priorités, et l'attention particulière apportée aux critères réels établis pour évaluer les priorités de recherche respectives. Pour Martin et Singer (2002), il s'agit de la stratégie décrire-évaluer-améliorer : décrire l'établissement des priorités dans son contexte; l'évaluer en utilisant un cadre éthique comme le cadre AFR; s'appuyer sur l'évaluation pour améliorer l'acte d'établir des priorités. Nous ajouterions un quatrième élément à cette stratégie : disséminer. Il s'écoulera du temps avant que l'expérience des pays à revenu faible et intermédiaire soit consignée officiellement, nous devrons cependant tirer des leçons des initiatives et des expériences en cours sur l'établissement des priorités – pour adapter, appliquer et finalement raffiner ces actes essentiels de délibération.

6. Aperçu du présent module

La section 2 du présent module traite des processus et des exercices d'établissement des priorités, de façon plus détaillée. Nous examinerons tous les processus, même si chaque processus n'est pas nécessairement un processus interprétatif d'établissement de priorités pour la recherche, afin de faire ressortir les points pertinents et de tirer des leçons qui pourraient s'appliquer à ce dernier type de processus. Cela comprend un aperçu du processus interprétatif d'établissement de priorités « idéal »; des méthodes participatives pour l'établissement des priorités; de la consultation À l'écoute; du modèle CAM (Combined Approach Matrix) et du modèle PBMA (Program Budgeting and Marginal Analysis). Nous passerons en revue la documentation sur chacun de ces processus, présenterons leurs fonctions de base et discuterons de leur schéma logique, de leurs forces et de leurs limites.

La section 3 décrit et analyse les principaux concepts du dialogue délibérant, en abordant notamment les moyens de trouver et d'analyser les intervenants concernés (y compris les différents outils pour l'analyse des intervenants), les moyens d'obtenir la participation de nombreux intervenants (schématisation conceptuelle, la technique Delphi et la technique du groupe nominal) ainsi que les types de mécanismes de dialogue délibérant qui conviennent bien à l'établissement des priorités (par exemple, rôles du groupe de travail technique et du groupe de référence élargi).

La section 4 présente des observations et des conclusions sur la façon de mieux adapter les techniques de délibération à tout processus d'établissement des priorités. Elle porte notamment sur les processus d'établissement des priorités dans les pays à revenu faible et intermédiaire; les domaines de la recherche future; les façons dont les établissements et les systèmes (systèmes nationaux de recherche en santé) peuvent améliorer leur travail d'établissement des priorités à l'aide de techniques de délibération. Cette section aborde aussi certaines considérations importantes pour les évaluations.

Section 2 : Processus d'établissement des priorités

1. Introduction

Il existe de nombreux processus pour l'établissement des priorités, chacun se distinguant particulièrement en fonction du niveau (mondial, national, institutionnel), du degré d'exhaustivité (priorités de recherche pour le secteur de la santé; recherche sur des interventions particulières), de l'équilibre entre les approches techniques et interprétatives, et de la participation des intervenants (Ranson et Bennett 2009). Dans la section 2 du présent module, nous examinons les particularités de cinq approches différentes pour l'établissement des priorités : le processus interprétatif d'établissement des priorités « idéal »; les méthodes participatives pour l'établissement des priorités; le modèle À l'écoute de la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé (FCRSS); le modèle Combined Approach Matrix (CAM) [matrice de l'approche combinée] du Forum mondial de la recherche en santé, et le modèle PBMA.18 Dans la présente section, nous examinerons la documentation sur chacun de ces modèles, fournirons un aperçu de leur schéma logique avec des organigrammes et des graphiques et décrirons brièvement les forces et les limites de ces modèles.

2. Processus interprétatif d'établissement des priorités « idéal »

Dans sa forme interprétative idéale, l'établissement des priorités suppose le choix des bonnes personnes pour faire un remue-méninges sur les bonnes questions afin de déterminer quelles sont les priorités de recherche d'une société, d'un système ou d'un établissement.19 Bien qu'il n'y ait pas unanimité sur les éléments qui assurent le succès d'un processus d'établissement des priorités (Sibbald et al. 2009), nous pouvons néanmoins, en nous appuyant sur une perspective théorique, dresser une liste itérative des sept éléments idéaux d'un processus d'établissement des priorités pour la recherche qui répondent aux conditions de responsabilité du caractère raisonnable énoncées par Daniel (2000) – un processus juste, légitime, pertinent, public, susceptible d'appel, et réalisable. La figure 1 donne un aperçu des sept étapes du processus interprétatif d'établissement des priorités idéal.

Figure 1 : Les sept étapes du processus interprétatif d'établissement des priorités idéal20

Figure 1 : Les sept étapes du processus interprétatif d'établissement des priorités idéal

2.1 Planification du processus

Cette étape est cruciale pour prévoir les besoins, les obstacles et les défis pour toutes les étapes suivantes. À cette étape de planification, il faut définir le leadership, en portant une attention particulière aux personnes et aux établissements essentiels. Il peut s'agir d'un « groupe de travail technique » (GTT) (équipe de consultation principale, conseil des aînés, etc.) constitué de représentants des principaux établissements. Le GTT doit déterminer l'échéance du processus, la logistique, le budget, le plan de dissémination, etc., sans l'influencer indûment ou en altérer les nombreux détails.21 Il est possible que les membres du GTT doivent être choisis à l'aide des techniques d'analyse des intervenants décrites à l'étape 2 ci-dessous (et à la section 3).

2.2 Choix, analyse et participation des intervenants

Comme nous l'avons mentionné dans l'introduction, peu de processus d'établissement des priorités apportent une attention suffisante à la façon dont les intervenants sont choisis. Comment amener les bonnes personnes à prendre part à la discussion? Comment un processus d'établissement des priorités peut-il assurer une représentation équilibrée des différents établissements, intérêts et niveaux? Comme nous en discutons plus en détail à la section 3, une analyse des intervenants est un outil essentiel pour déterminer qui doit participer aux discussions. Un outil qui aide les responsables du processus d'établissement des priorités à reconnaître :

  • l'importance, l'influence et les intérêts des intervenants par rapport au programme de recherche ou à un thème ou à un enjeu de recherche particulier. Cela peut concerner les intervenants primaires et les intervenants secondaires.
  • les paliers et les niveaux, lorsque les intervenants sont des établissements complexes – par exemple, des entités telles que le ministère de la Santé, une collectivité ou l'Organisation mondiale de la santé peuvent être traitées comme un acteur unique ou des acteurs multiples selon la nature des enjeux. Il peut en fait y avoir plusieurs intervenants venant d'un seul établissement.
  • le « niveau » des intervenants – local, régional, national, et/ou international.
  • les conflits possibles, conflits d'intérêts, ou risques pouvant compromettre le processus;
  • les possibilités et relations qui peuvent être établies au cours du processus;
  • les groupes qui peuvent être encouragés à participer aux différentes étapes du processus;
  • les stratégies et les approches appropriées pour la participation des intervenants (WWF, 2005).

Effectuée par le GTT (ou un consultant), une analyse des intervenants permet de bien connaître les membres du GTT lui-même et les membres potentiels d'un groupe de référence élargi (GRE), chacun agissant comme un filtre et ajoutant des niveaux de contexte et de légitimité au processus. Le GTT peut aussi effectuer ou commander une analyse de la situation afin de mieux comprendre les acteurs concernés par un domaine, un thème ou une question; les besoins en information réels du processus, et/ou les aspects pertinents du système global de recherche en santé.

2.3 Gestion des connaissances

La circulation des connaissances au cours du processus est aussi d'une importance capitale. Dès le début, il faut mettre en place des mécanismes pour la circulation des connaissances afin que tous les intervenants aient la même information; il faut aussi prendre des mesures pour que les participants ayant moins de connaissances techniques puissent interagir avec ceux qui en ont plus. Avant le début du processus, l'information pertinente doit être mise à la disposition des intervenants (par exemple, revues systématiques, publications examinées par des pairs, littérature grise, documents nationaux sur les politiques de recherche en santé). La disponibilité des connaissances – et les connaissances que l'on choisit de rendre disponibles – influent directement sur les priorités choisies, et par conséquent, il doit y avoir équilibre entre la rigueur et la spontanéité (groupe de travail 2000).

De toute évidence, tout processus d'établissement des priorités nécessite l'élaboration d'une stratégie de gestion des connaissances pour répondre aux questions et aux besoins susmentionnés. Une telle stratégie devrait s'articuler autour de trois grands axes :22

  • quels sont les besoins en connaissances et en information des intervenants? Ont-ils tous le même niveau d'instruction? Peuvent-ils tous lire la même langue? Ont-ils tous le même accès aux sources de connaissances?
  • comment les connaissances influent-elles sur le processus d'établissement des priorités? Où doit-on les inclure dans le processus? Comment les responsables peuvent-ils faire en sorte que l'information est accessible aux intervenants durant et après le processus? Comment sera-t-elle disséminée pour assurer la transparence et la responsabilité du processus?
  • comment doit-on utiliser les personnes, les processus et les technologies – en ce qui concerne les pratiques et les outils particuliers? Comment les personnes peuvent-elles avoir accès aux connaissances et à l'information et comment peuvent-elles échanger des connaissances et de l'information?

2.4 Ateliers interprétatifs

Il peut y avoir un atelier pour un groupe d'intervenants choisis (par exemple, le GTT) ou il peut y en avoir plusieurs; il peut aussi y avoir une série d'ateliers pour différents groupes ou niveaux d'intervenants. Dans tous les cas, au cours d'un atelier interprétatif, les intervenants se réunissent pour discuter des critères d'évaluation des priorités; établir des moyens pour soupeser ou classer les critères; appliquer les critères aux priorités définies (groupe de travail 2000), ou déterminer de plus vastes options de recherche en santé (Rudan et al. 2007b). Ces ateliers sont ouverts, délibérants et itératifs – les priorités conflictuelles peuvent mener à des techniques favorisant le consensus, ou les responsables peuvent décider que la nature du conflit est un élément important qui n'a pas besoin d'être résolu. Les ateliers peuvent découler des éléments suivants :

  • réactions au matériel qui a été distribué au préalable (ce qui peut inclure une liste exhaustive des enjeux ou des questions de recherche prioritaires);
  • remue-méninges sur les questions ou les enjeux importants, pressants ou litigieux;
  • discussion des critères qui devraient être utilisés pour classer les enjeux de recherche ou les questions exactes;
  • entente sur une série officielle de critères et les moyens de soupeser ces critères (certains peuvent être plus/moins importants que d'autres);
  • application de ces critères aux questions ou aux enjeux de recherche pour en arriver à une liste de questions ou d'enjeux cotés ou classés;
  • discussion des types de recherche qui pourraient mieux éclairer les questions ou les enjeux.

Veuillez noter qu'il y a trois niveaux possibles de délibération. Les ateliers interprétatifs peuvent aborder des enjeux de recherche particuliers (par exemple la malnutrition), une question de recherche précise (par exemple, le rôle de l'administration de suppléments en vitamine A dans trois régions de la Tanzanie pour réduire les déficiences nutritionnelles) ou une option de recherche en santé plus vaste (par exemple, facteurs dans le système de santé qui empêchent ou favorisent l'administration de suppléments en vitamine A en Tanzanie).

2.5 Conversion des enjeux en questions de recherche

Bien que certains ateliers interprétatifs peuvent traiter de questions de recherche précises, il est plus probable qu'ils abordent des considérations politiques, des enjeux et/ou des options de recherche qui peuvent alors (selon le contexte) être convertis en questions réelles. Le GTT devrait diriger ce processus, et pourrait alors organiser un autre atelier interprétatif pour discuter de la liste de questions et de leur priorité respective.

2.6 Publicisation et validation

La liste finale des enjeux, questions et/ou options doit maintenant être mise à la disposition d'un plus grand groupe d'intervenants (un groupe de référence élargi ou GRE), pour s'assurer qu'elle correspond aux valeurs et aux besoins de toutes les personnes concernées et qu'elle définit clairement les résultats attendus des travaux – cela va de la liste générale des problèmes ou enjeux de santé (système) à la liste détaillée des questions de recherche prioritaires. Le GTT devrait fournir à chaque membre du GRE toute l'information nécessaire, suffisamment à l'avance. Le GTT dirigera alors la réunion du GRE, qui peut être entreprise virtuellement, mais qui se conclura par l'établissement d'une liste complète de priorités validées ou d'une série de critères classés en fonction d'un contexte particulier. Par exemple, plutôt que de déterminer des priorités précises, les membres du GRE valident les éléments qui les concernent le plus (équité, santé de la mère et de l'enfant). La consultation et le vote sont sans doute les moyens les plus faciles d'arriver à un consensus sur le classement des critères ou la liste de priorités.

2.7 Révision ou mécanisme d'appel

Une fois que la liste des priorités a été publiée et qu'elle a été discutée par un grand nombre de personnes, il faut qu'il y ait un mécanisme en place permettant de traiter les divergences d'opinion de façon exhaustive et constructive. Un tel processus de révision devrait 1) améliorer la qualité des décisions en permettant d'apporter de la nouvelle information, de corriger les erreurs, et de remédier aux lacunes; 2) opérationnaliser la capacité d'agir, un concept éthique important (Sibbald et al. 2009).

Adaptée au modèle interprétatif idéal, la figure 2 montre des éléments qui, à différentes étapes du processus, le facilitent ou y font obstacle.

Figure 2 : Éléments qui favorisent le processus interprétatif d'établissement des priorités idéal et éléments qui y font obstacle.23

Figure 2 : Éléments qui favorisent le processus interprétatif d'établissement des priorités idéal et éléments qui y font obstacle.

3. Méthodes participatives pour l'établissement des priorités

Reconnaissant le manque de mécanismes viables et vérifiés pour l'établissement des priorités à l'échelle nationale, principalement dans les pays à revenu faible et intermédiaire, les recherches et les expériences récentes ont mis l'accent sur une nouvelle série d'approches – la plupart étant des variantes du processus interprétatif idéal susmentionné. Faisant appel à un grand nombre d'intervenants, ces approches permettent de définir les enjeux politiques actuels et les priorités de recherche; d'évaluer dans quelle mesure la recherche actuelle peut étudier ces enjeux et ces priorités; d'élaborer une liste des principales priorités pour la recherche future, et de disséminer ensuite ces priorités à des fins de discussion et de révision. De telles approches mènent à l'établissement de priorités adaptées au contexte et fondées sur des données probantes et sur les avis des intervenants, et ont grandement revitalisé le fait d'établir des priorités à l'échelle nationale, régionale et même mondiale, en ce qui concerne particulièrement la recherche sur les systèmes de santé et le renforcement des systèmes nationaux de recherche en santé.

Dans la présente section, nous étudions des exemples particuliers de modèles d'établissement des priorités ainsi que les leçons tirées à l'échelle régionale (paragraphe 3.1); un enjeu de recherche en santé mondial (paragraphe 3.2); à l'échelle d'un pays (paragraphe 3.3); et pour un établissement de niveau national (paragraphe 3.4). Il est important de noter que chacun de ces modèles comporte un différent nombre d'étapes, du début à la fin. Cela reflète la capacité de chaque exercice d'adapter le processus à ses besoins particuliers – dans certains processus, par exemple, il peut être plus difficile de trouver et de réunir des intervenants; il pourrait être nécessaire de les traiter comme des groupes à part.

3.1 Établissement de priorités selon une méthode participative à l'échelle régionale : Amérique latine, Afrique orientale, Asie du Sud-Est, et Moyen-Orient/Afrique du Nord

L'Alliance pour la recherche sur les politiques et les systèmes de santé de l'OMS a mis au point cette méthode pour l'établissement des priorités dans trois thèmes de recherche en santé – le rôle du secteur non public; le financement; les ressources humaines dans le secteur de la santé – dans vingt-quatre pays à revenu faible et intermédiaire de quatre grandes régions du monde (Amérique latine, Afrique orientale, Asie du Sud-Est et Moyen-Orient/Afrique du Nord).

Le processus comprenait des entrevues avec des informateurs-clés, des examens de la littérature et la rédaction d'articles thématiques par quatre différents organismes de pays à revenu faible et intermédiaire. Une fois que les enjeux politiques et les sujets de recherche ont été définis et synthétisés, on a invité des experts de ces régions à participer à un atelier de validation et de consultation pour établir les critères qui serviront à trier les enjeux et les priorités et à les classer en fonction des points suivants : a) peut-on répondre à la question de recherche? b) quelle est l'importance des répercussions probables sur le bien-être de la collectivité? (répercussions, à la fois sur la santé et l'équité); c) y a-t-il une lacune en recherche sur ce sujet? Les intervenants ont ensuite discuté des types de recherche qui permettraient de mieux répondre aux quatre questions de recherche retenues. La dissémination des résultats et les produits des ateliers de validation ont permis de boucler la boucle avec les responsables des politiques recevant les listes des priorités en réponse à leurs inquiétudes initiales.24

D'un métaniveau, la figure 3 montre les quatre étapes clés de cette approche. La figure 4 fournit des détails sur un processus régional particulier.

Figure 3 : Les quatre grandes étapes des méthodes participatives pour l'établissement des priorités à l'échelle régionale

Figure 3 : Les quatre grandes étapes des méthodes participatives pour l'établissement des priorités à l'échelle régionale

Figure 4 : Processus d'établissement des priorités au Moyen-Orient et en Afrique du Nord25

Figure 4 : Processus d'établissement des priorités au Moyen-Orient et en Afrique du Nord

3.2 Child Health and Nutrition Research Initiative (Initiative de recherche sur la nutrition et la santé de l'enfant)

Un processus participatif pour l'établissement des priorités particulièrement novateur a été mis en oeuvre par la fondation internationale Child Health and Nutrition Research Initiative (CHNRI) (Rudan et al. 2008; Tomlinson et al. 2007; Rudan et al. 2007b) et utilisé pour la première fois à l'échelle d'un pays en Afrique du Sud, en 2006. Ce processus participatif a apporté deux contributions importantes au domaine en s'intéressant moins à la création de nouvelles connaissances et davantage à « l'option recherche en santé » et à sa « vision de la mise en oeuvre » (Rudan et al. 2007b), et en portant une attention particulière sur les façons d'incorporer les valeurs et les principes de la société par l'entremise d'un GRE. La méthode de la CHNRI combine l'approche technique et l'approche interprétative, principalement en s'assurant que les experts techniques fournissent leurs suggestions et commentaires de façon anonyme, et que le classement final de chaque option de recherche soit fait d'une manière ouverte et systématique pour assurer la transparence, la répétition et la validation (Rudan et al. 2008).

Comme le constatent Rudan et al. (2008), la méthode de la CHNRI pour l'établissement des priorités a donné sept résultats convaincants : meilleure compréhension du contexte; entente sur les attentes et les risques acceptables; définition des principaux critères pour l'établissement des priorités; liste des différentes options d'investissement en recherche; évaluation transparente de chaque option; adaptation de chaque option aux valeurs sociales; prise en compte de cette adaptation en regard des coût prévus, des profits attendus et des préférences en matière de risques pour décider de la stratégie d'investissement optimale (Rudan et al. 2008). Cette approche est systématique, elle limite l'influence des experts techniques, donne un résultat quantitatif final (cote les priorités de recherche), permet d'évaluer et de classer les différents types de recherche et, essentiellement, grâce à la participation du GRE, inclut un moyen efficace de tenir compte des opinions des intervenants et du public en général, qui ont ainsi le pouvoir de limiter et de pondérer les cotes intermédiaires (qui sont fondées sur l'opinion collective des experts techniques) et ainsi de façonner considérablement le résultat final (Rudan et al. 2007b).

En 2006, cette méthode a été mise à l'essai pour la première fois à l'échelle d'un pays, en Afrique du Sud. (Tomlinson et al. 2007). La figure 5 montre les étapes suivies au cours de l'exercice.

Figure 5 : Établissement des priorités pour l'investissement en recherche sur la santé des enfants en Afrique du Sud26

Figure 5 : Établissement des priorités pour l'investissement en recherche sur la santé des enfants en Afrique du Sud

3.3 Mongolie

En Mongolie, un processus d'établissement des priorités se déroule actuellement afin d'orienter les prochains investissements en recherche en santé, en portant une attention particulière à la santé et à l'exploitation minière. Grâce aux discussions entre experts, à l'analyse ainsi qu'à la création et à l'application de critères pour soupeser et classer les questions de recherche, le processus devrait bientôt générer un programme de recherche convenu par de nombreux intervenants. Ce programme sera disséminé activement, grâce à des fonds venant du secteur public et du secteur privé pour appuyer la recherche sur les enjeux et les questions prioritaires. De façon importante, il fera intervenir les responsables des politiques, des chercheurs et des collectivités de la Mongolie et tiendra compte de leurs besoins. La figure 6 est une représentation graphique de ce processus.

Figure 6 : Établissement des priorités en Mongolie : santé et exploitation minière

Figure 6 : Établissement des priorités en Mongolie : santé et exploitation minière

En plus de la création de connaissances scientifiques dans des secteurs prioritaires urgents, les sous-produits que l'on attend du processus sont les suivants :

  • Nouvelles adhésion et participation au système de recherche en santé. Le groupe d'experts réuni pour le processus pourrait jouer d'autres rôles importants (et souvent non assumés) au sein du système de recherche en santé; il pourrait notamment assurer la coordination et la surveillance et devenir un comité spécial sur la recherche en santé apportant son expertise et ses réflexions au processus d'élaboration des politiques.
  • La détermination des priorités pourrait révéler des blocages dans la coordination de la recherche et le réseautage entre les principaux acteurs, ce qui pourrait faire naître de nouvelles perceptions et idées, et de nouveaux projets et initiatives (par exemple, la création d'un organisme national de coordination; la création d'un réseau national pour la recherche et les chercheurs en santé; la création de nouvelles stratégies concernant les bases de données et la gestion des connaissances).
  • En plus de préciser les lacunes dans les connaissances en Mongolie, le processus pourrait révéler aussi les types de « pratiques exemplaires » et les « leçons apprises » provenant d'autres contextes et qui pourraient guider directement les perspectives mongoliennes (par exemple, l'interconnexion entre l'exploitation minière, les responsabilités sociales des entreprises et les systèmes de santé dans d'autres pays à revenu intermédiaire tels que l'Afrique du Sud, le Chili et la Colombie).
  • Discuter de la recherche – en tant qu'intrant au processus d'élaboration des politiques et au mécanisme de résolution de problèmes socio-économiques – renforce la perception de la recherche en tant que ressource valable.

3.4 Le National Institute for Occupational Safety and Health

Le National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH) aux États-Unis a élaboré son propre processus participatif pour l'établissement des priorités, et ce dernier est légèrement différent des autres modèles susmentionnés (Rosenstock et al. 1998). Ce processus, qui vise l'établissement d'un consensus, s'appuie sur les suggestions formulées par les groupes de travail et les participants d'assemblées publiques ouvertes pour établir des priorités de recherche finales. Les groupes de travail – un groupe de chercheurs, un groupe d'intervenants, un groupe de professionnels de la santé et un groupe d'employés des NIOSH – définissent d'abord des domaines prioritaires; grâce à un processus itératif, cette liste est réduite à 23 sujets en fonction de critères tels que la gravité du risque, le nombre de travailleurs exposés, les possibilités de réduire les risques, etc. Les assemblées publiques permettent d'abord d'établir et, ensuite, de peaufiner la liste maîtresse des priorités pour National Occupational Research Agenda (NORA) [programme national de recherche sur la santé au travail] en apportant des commentaires et des critiques menant à l'élaboration d'un processus public pour orienter un programme de recherche. La figure 7 montre l'interrelation entre les étapes.

Figure 7 : Établissement d'un programme national de recherche sur la santé au travail27

Figure 7 : Établissement d'un programme national de recherche sur la santé au travail

4. À l'écoute

Lancée par la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé (FCRSS), la consultation À l'écoute est un solide processus interprétatif d'établissement des priorités qui diffère très peu de la méthode idéale décrite précédemment. Les intervenants concernés peuvent exprimer leurs opinions sur des enjeux importants. À l'écoute repose sur le principe de la création de liens et de l'échange entre les bailleurs de fonds et les chercheurs, d'une part, et avec les utilisateurs des résultats de la recherche, d'autre part. Ainsi, les partenaires ont participé à une analyse de la situation et à des ateliers à l'échelle régionale et nationale avec des participants invités concernés par des enjeux pressants auxquels les responsables de politiques devraient devoir faire face à moyen terme (d'ici trois à cinq ans) (Smith et al. 2009). Le but ultime de la démarche est de créer et de favoriser la production, en temps opportun, de données pertinentes pour orienter la prise de décisions en matière de soins de santé : une écoute mutuelle est nécessaire pour s'entendre sur des priorités de recherche utiles aux responsables des politiques, réalisables par le milieu de la recherche et pouvant être adaptées à la pratique (Lomas et al. 2003). La figure 8 montre la progression de ces étapes.

Figure 8 : Les six étapes du modèle À l'écoute28

Figure 8 : Les six étapes du modèle À l'écoute

Comme le décrivent Smith et al. (2009), À l'écoute a été utilisé pour regrouper de nombreux intervenants de la Colombie-Britannique qui étaient « à l'écoute ». Les organisateurs ont suivi les sept étapes suivantes :

  1. Les principaux intervenants de chacune des autorités sanitaires de la Colombie-Britannique ont été recrutés en tant que partenaires de recherche.
  2. Ces partenaires de recherche ont été invités à un forum afin de choisir des partenaires responsables des politiques (ou leurs remplaçants) et des personnes de différents secteurs et des titulaires de postes (directeurs des finances, vice-présidents, chefs de direction).
  3. Lors de chacun des forums sur l'établissement de priorités, on a discuté des questions de recherche possibles.
  4. Pour chaque forum, on a rédigé un compte rendu de la discussion et du contexte.
  5. Un sommaire de ces notes – incluant les questions possibles – a été distribué aux responsables des politiques pour vérifier que leurs idées et leurs opinions ont été bien comprises.
  6. Le principal auteur de l'étude a analysé ces notes afin de regrouper les questions de recherche possibles et les commentaires généraux en une série de thèmes clés; un deuxième auteur a effectué une analyse additionnelle et un examen des résultats, et tous les auteurs ont apporté des commentaires (Smith et al. 2009).
  7. Après ces forums, les chercheurs ont rencontré les responsables des politiques pour discuter de ces résultats et préciser les domaines où il serait possible de travailler en partenariat.

5. Le modèle CAM (Combined Approach Matrix)

Le modèle CAM ou « matrice de l'approche combinée » a été mis au point en 2004 par le Forum mondial de la recherche en santé. L'objectif de ce modèle est d'incorporer les aspects économiques et institutionnels dans un seul outil – une approche combinée – pour l'établissement de priorités. L'avantage de cet outil est qu'il permet d'organiser, de résumer et de présenter toute l'information disponible sur une maladie, un facteur de risque, un groupe ou une situation, et de comparer facilement le rapport coût-efficacité de différents types d'interventions, à différents niveaux. L'information peut être incomplète, même rudimentaire dans certains cas, mais elle s'améliorera peu à peu. Même une information limitée peut parfois laisser entrevoir des avenues prometteuses pour la recherche. Le modèle CAM cherche, avant tout, à résumer l'ensemble des données concernant des maladies ou des facteurs de risque particuliers et fait ainsi ressortir les lacunes nécessitant plus de recherche et d'intervention (Ghaffar et al. 2004). La figure 9 montre le type de tableau essentiel à l'exécution du modèle CAM.

Figure 9 : Modèle CAM (Combined Approach Matrix)29

Figure 9 : Modèle CAM (Combined Approach Matrix)

Le modèle aide à organiser et à résumer l'information sur une maladie particulière et les interventions pour la combattre. Comme le montre le tableau ci-dessus, l'information est catégorisée selon cinq « aspects économiques » (par exemple, le fardeau de la maladie et le rapport coût-efficacité des interventions) et quatre « aspects institutionnels » représentant les divers niveaux où on peut intervenir.

L'information obtenue dans un exercice d'établissement des priorités mené à l'échelle nationale, régionale et mondiale pourrait être introduite dans le modèle CAM en tant que cadre commun pour organiser et présenter l'information recueillie (elle pourrait servir de base pour cerner les lacunes et les priorités en recherche en santé. Comme nous pouvons le constater en remplissant la grille, le modèle CAM :

  • regroupe dans un cadre systématique toute l'information (connaissances actuelles) concernant une maladie ou un facteur de risque particulier;
  • permet de cerner les lacunes dans les connaissances et les défis futurs;
  • établit un lien entre le processus en cinq étapes pour l'établissement des priorités (axe économique) avec les acteurs et les facteurs (axe institutionnel) déterminant l'état de santé d'une population;
  • permet de reconnaître les « facteurs communs » en examinant les facteurs de risque des maladies;
  • s'applique à l'établissement de priorités dans les domaines suivants :
    • problèmes nationaux, régionaux ou mondiaux
    • les maladies et les facteurs de risque
  • permet de lier les priorités dans le domaine de la santé et de la recherche en santé;
  • permet de reconnaître rapidement l'effet qu'un changement dans l'une des « cases » du modèle peut avoir sur les autres;
  • permet de prendre en considération un grand nombre de facteurs qui sont à l'extérieur du domaine de la santé et qui ont des répercussions importantes sur la santé des gens. (Ghaffar et al. 2004).

La figure 10 montre les étapes sous forme de graphique.

Figure 10 : Les sept étapes du modèle CAM30

Figure 10 : Les sept étapes du modèle CAM

Comme divers intervenants le font remarquer, le modèle CAM a certains défauts, notamment parce qu'il est non inclusif et qu'il est orienté en fonction de maladies particulières. Toutefois, il s'agit d'un outil extrêmement utile pour recueillir et organiser l'information nécessaire à l'établissement de priorités; comme tel, ce n'est pas un algorithme pour la prise de décisions sur les priorités en classant ou en séparant les options d'investissement concurrentes. Par conséquent, en l'absence d'information fiable, laquelle est habituellement très rare dans les pays en développement, la plupart des décisions seront fondées sur des discussions et des ententes avec des groupes d'experts (Rudan et al. 2007a). Il s'agit d'une approche d'établissement de priorités principalement orientée sur la maladie qui ne convient pas bien à l'établissement de priorités au niveau d'un système de santé. De nombreuses questions de recherche sur les systèmes de santé visent à apporter des solutions pour un grand nombre de maladies. Lier les questions de recherche sur les systèmes de santé à des maladies particulières, plutôt que de les considérer dans leur totalité, fait en sorte que l'on accorde habituellement pas la priorité à ces sujets et contribue à la fragmentation de la recherche sur les systèmes de santé (Ranson and Bennett 2009).

6. Modèle PBMA (Programme Budgeting and Marginal Analysis)

Le modèle PBMA ou « budgétisation des programmes et analyse marginale » est souvent utilisé au niveau des organisations (surtout par des établissements offrant des services) pour prendre une décision sur des services concurrents, ou déterminer un ensemble de services réalisables. Le principe de base étant le suivant : pour réaliser plus de choses, nous devons prendre les ressources ailleurs, soit en réalisant plus de choses à un coût moindre, ou en réaffectant les ressources au sein des autres secteurs des soins de santé. Cela nécessite une mesure exacte des coûts et des avantages des programmes de soins de santé (Peacock et al. 2006). Le modèle PBMA diffère des autres outils d'établissement des priorités susmentionnés parce qu'il porte sur la prestation de services; il a cependant été incorporé efficacement à l'établissement des priorités de recherche – surtout par Tomlinson et al. (2007) en Afrique du Sud, où le modèle PBMA a été utilisé pour évaluer le coût de différentes options de recherche. En fait, cette fonction – l'évaluation du coût « réel » d'une question ou d'une option – pourrait être la meilleure contribution que le modèle PBMA peut apporter à l'établissement de priorités pour la recherche.

Selon les articles de Mitton et Donaldson (2004) et de Mitton et al. (2003), le modèle PBMA englobe deux importants piliers économiques. Le premier étant le coût de la possibilité, ce qui implique qu'en investissant des ressources dans un projet donné, on perd la possibilité de faire un profit en investissant ces ressources ailleurs. Par conséquent, l'un des éléments importants dans l'établissement des priorités consiste à mesurer ou à soupeser les coûts et les avantages d'une démarche par rapport à une autre. L'autre principe est la marge, qui concerne le changement de l'ensemble des ressources. Si le budget augmente, il est raisonnable de se demander quelle serait la meilleure façon de dépenser les ressources additionnelles. Par contre, si le budget diminue, il est probable que l'on veuille retirer des ressources de secteurs moins profitables. Enfin, si le budget n'augmente ni ne diminue, au moins de façon non continue, il faut encore se demander si les ressources devraient être réaffectées (des coupures dans certains domaines permettent l'expansion d'autres domaines) afin de profiter davantage à la population desservie. Le concept de la marge est essentiel à l'élaboration d'une approche pour l'établissement des priorités (Mitton et Donaldson 2004). La figure 11 montre les sept différentes étapes du processus.

Figure 11 : Les sept étapes du modèle PBMA31

Figure 11 : Les sept étapes du modèle PBMA

Section 3 : Processus de délibération

1. Introduction

Dans la documentation sur l'établissement des priorités, on constate une lacune importante : elle se situe au début du processus et elle concerne les intervenants. Mais, qu'est-ce qu'un intervenant? Comment les intervenants sont-ils choisis et analysés? Comment peut-on déterminer qu'un intervenant est compétent pour participer à un processus d'établissement des priorités et qu'un autre ne l'est pas? Quels sont les outils pour analyser les relations et les dynamiques entre les intervenants?

La question de savoir comment susciter la participation des intervenants s'ajoute aussi à toutes ces interrogations. De toute évidence, les mécanismes pour y arriver ne sont pas égaux – il peut s'agir d'une entrevue structurée ou d'une rencontre fortuite dans le corridor. Pour assurer l'impartialité et la légitimité de tout processus d'établissement des priorités, il faut non seulement trouver les bons intervenants, il faut aussi accorder à chacun le temps et l'espace nécessaires pour s'exprimer, sinon certains sujets parlant haut et fort pourraient bien dominer toutes les discussions. S'appuyant sur ce principe, les processus de délibération permettent d'orienter, de soupeser et de synthétiser les opinions et les préoccupations de chaque intervenant pour assurer un équilibre objectif – entre la rigueur et la spontanéité, entre les aspects techniques et les aspects généraux, et entre les intervenants.

C'est pourquoi la présente section est divisée en trois parties :

To that end, this section is divided into three. Here we explore a range of practical tools for:

  • trouver et analyser les intervenants;
  • susciter la participation des intervenants;
  • organiser des dialogues délibérants.
Trouver des intervenants à favoriser leur participation à délibérer

2. Trouver et analyser les intervenants

Dans tout processus d'établissement des priorités, trouver les « bons » intervenants ne se résume pas simplement à dresser une liste de noms. Même si la démarche commence souvent par un remue-méninges, plus on peut découvrir et analyser non seulement des personnes, des établissements et des réseaux compétents, mais aussi les principes sous-jacents, les forces en faveur du changement ou la résistance au changement ainsi que la dynamique déterminante entre les intervenants, plus le processus d'établissement des priorités permettra de comprendre la complexité et d'y faire face. Certains processus sont relativement simples, mais dans la plupart des cas, la multiplicité des intervenants entraîne une certaine confusion – par exemple, dans l'établissement des priorités pour le financement de la recherche en santé, quels acteurs doivent intervenir? Comment doivent-ils intervenir et quand doivent-ils le faire?

Dans tout processus d'établissement des priorités, les responsables doivent comprendre :

  • les différents intervenants dans un milieu de recherche ou un secteur politique précis;
  • le pouvoir, la participation et les intérêts de ces intervenants;
  • dans quelle mesure chaque intervenant appuie une position particulière, une idéologie ou une perspective politique;
  • la dynamique entre les divers intervenants;
  • les réseaux politiques et les influenceurs sous-jacents.

2.1 Analyser les intervenants

Qu'est-ce qu'un « intervenant »? Comment pouvons-nous distinguer les principales variables que sont le pouvoir, la participation et les intérêts entre différents intervenants?

Nous définissons les intervenants comme tout individu, groupe ou établissement ayant un intérêt direct dans le processus d'établissement des priorités. L'expression « intérêt direct » désigne quelque chose qu'ils peuvent gagner ou perdre, leurs droits, ou leur adhésion à une cause (WWF, 2005; Bourne et Walker 2006). Selon Bryson (2004), un intervenant gagne en importance s'il détient de l'information qui ne peut être obtenue autrement ou si sa participation est nécessaire pour assurer le succès de l'entreprise.

L'analyse des intervenants est un outil comprenant des étapes multiples pour découvrir et analyser des intervenants compétents ainsi que la dynamique entre les divers intervenants et entre les intervenants et leur milieu. De façon générale, elle permet de préciser la nature des intérêts des intervenants; dans quelle mesure il y a convergence ou chevauchement des intérêts des divers intervenants; l'importance ou l'influence des intervenants en ce qui concerne l'enjeu en cause; la dynamique entre les divers intervenants, et comment un changement de contexte peut modifier l'une ou l'autre de ces variables.

Comme l'article de la World Wildlife Foundation (2005) le précise, le but de l'analyse des intervenants est d'avoir une vue stratégique des ressources humaines et institutionnelles, des relations entre les divers intervenants et des enjeux qui leur tiennent à coeur. Il n'est ni possible ni souhaitable de faire participer tous les intervenants possibles ou de les satisfaire (Bryson 2004). L'analyse des intervenants permet de cerner les intervenants clés et de mettre l'accent sur ces derniers – généralement appelés intervenants primaires et secondaires. Les intervenants primaires ont un intérêt direct pour l'enjeu en cause; les intervenants secondaires ont un intérêt moindre ou peuvent être influencés indirectement – par exemple, par un changement d'actions de la part des intervenants primaires. Cela reflète l'effet de cascade qui existe entre les intervenants : leur dynamique n'est pas statique, et leurs relations peuvent changer constamment.

Point important : le simple fait de déterminer qui est intervenant primaire – et qui ne l'est pas – fait de l'analyse des intervenants un acte politique ayant certaines conséquences éthiques (Bryson 2004) et renforce la nature politique fondamentale du processus d'établissement des priorités en général. C'est pourquoi les analyses d'intervenants sont souvent effectuées en équipe, ce qui permet de réduire ou de neutraliser les préjugés et les suppositions. (Varvasovszky et Brugha 2000).

En résumé, une analyse des intervenants peut aider les responsables du processus d'établissement des priorités à découvrir :

  • l'importance, l'influence et les intérêts des intervenants primaires et des intervenants secondaires;
  • les paliers et les niveaux des organismes complexes – par exemple des entités telles qu'un ministère de la Santé, une collectivité ou l'Organisation mondiale de la santé peuvent être traitées comme un acteur unique ou des intervenants multiples, selon une analyse approfondie de leurs positions et de leurs besoins;
  • le « niveau » des intervenants à qui faire appel – local, régional, national, et/ou international;
  • les conflits possibles, les conflits d'intérêts ou les risques qui pourraient compromettre le processus;
  • les possibilités et les relations qui peuvent être exploitées durant le processus;
  • les groupes qui devraient être encouragés à participer à différentes étapes du processus;
  • les stratégies et les approches appropriées pour favoriser la participation des intervenants (WWF, 2005).

2.2 Analyse des intervenants : Composantes, approches et outils

Comme le montre la littérature, il existe différentes façons de procéder à une analyse des intervenants. Le lecteur trouvera ci-dessous un amalgame de ces approches, réparties en neuf composantes distinctes. Certaines sont des étapes séquentielles; d'autres, des outils indépendants. Certaines dépendent du travail effectué en atelier facilité; d'autres, d'une collecte de données d'une rigueur scientifique.

  • 2.2.1 : Planification du processus
  • 2.2.2 : Constitution (et probablement formation) d'un groupe de travail ou d'un groupe d'experts
  • 2.2.3 : Établissement d'un plan et d'un échéancier
  • 2.2.4 : Définition de l'enjeu ou du problème (types ou priorités)
  • 2.2.5 : Outils de recherche pour trouver les intervenants
  • 2.2.6 : Animation d'une séance de remue-méninges
  • 2.2.7 : Grille « Pouvoir contre intérêts »
  • 2.2.8 : Schématisation de l'influence des intervenants
  • 2.2.9 : Diagrammes sur l'interrelation entre les enjeux et les intervenants
2.2.1 Planification du processus

Cette première étape aide à définir le but général de l'analyse des intervenants, en déterminant qui sont les utilisateurs possibles de l'information et en établissant un plan pour l'utilisation de cette information. Il faut nommer un responsable qui prendra en charge le processus au complet. Ce responsable devra s'assurer qu'il y a consensus en ce qui a trait aux objectifs du processus, aux utilisateurs de l'information et à la façon dont l'information sera utilisée (Schmeer 2005).

2.2.2 Constitution (et probablement formation) d'un groupe de travail ou d'un groupe d'experts

Le responsable devrait réunir un groupe de travail ou un groupe d'experts inclusif (comme une équipe de consultation principale, un groupe d'étude, ou un groupe de travail technique) pour superviser l'analyse. Comme le mentionne Schmeer (2005), ce groupe devrait représenter des organismes et des intérêts différents pour éviter les partis pris et atténuer les dynamiques fondées sur le pouvoir et les personnalités; idéalement, un membre de ce groupe devrait être considéré neutre ou indépendant. On pourrait offrir une séance de formation pour présenter l'ensemble du processus d'établissement des priorités, et discuter du rôle particulier de l'analyse des intervenants dans le cadre de ce processus ainsi que des techniques et des outils particuliers que les membres du groupe devront surveiller et utiliser.

Veuillez noter que dans le processus d'établissement des priorités, il y a probablement déjà un groupe de travail technique en place; de toute évidence, ce groupe assumerait la prise en charge et le leadership de l'analyse.

2.2.3 Établissement d'un plan et d'un échéancier

Le groupe de travail/groupe d'experts devrait établir un échéancier décrivant les étapes particulières du processus. On devrait accorder suffisamment de temps pour les réunions, les entrevues, les présentations et ainsi de suite. (Schmeer 2005).

2.2.4 Définition de l'enjeu ou du problème

Chaque enjeu – qu'il s'agisse d'un enjeu national ou thématique – a ses propres niveaux et composantes. Une analyse des intervenants doit permettre de les saisir et de les comprendre, puisque cela pourrait permettre de découvrir des intervenants concernés dont on pourrait ne pas avoir tenu compte initialement. (Varvasovszky et Brugha 2000).

2.2.5 Outils de recherche pour trouver les intervenants

Selon Varvasovszky et Brugha (2000), il y a plusieurs méthodes différentes pour dresser une liste complète d'intervenants. Le choix de la bonne méthode dépend complètement de l'enjeu en cause – certains nécessitent des techniques de remue-méninges relativement simples, alors que d'autres, beaucoup plus complexes, exigent une approche rigoureuse et scientifique pour que les bons intervenants soient effectivement repérés. On peut commencer le remue-méninges en ayant recours à des outils de recherche familiers pour mieux comprendre l'enjeu, ce qui en retour permet de découvrir différents intervenants et des variables essentielles. Comme le précisent Varvasovszky et Brugha (2000), des entrevues face à face à l'aide de listes de contrôle, des entrevues structurées et semi-structurées et des questionnaires – devant souvent être remplis individuellement – sont tous des outils qui peuvent être utilisés pour recueillir des données de sources primaires. On interroge habituellement des répondants pris individuellement, bien que l'on puisse aussi interroger des groupes d'intervenants, soit dans le cadre de groupes de consultation ou de groupes de discussion non officiels. Les sources secondaires comprennent notamment des documents publiés et non publiés, des rapports, des énoncés de politique, des règlements internes d'organismes. Les entrevues permettent d'avoir accès à des sources secondaires additionnelles telles que des documents internes qui n'ont pas été obtenus lors de la recherche de documentation initiale. Des entrevues semi-structurées peuvent aider à structurer la collecte de données tout en gardant l'ouverture nécessaire pour découvrir des thèmes cachés ou émergents. Lorsque l'on analyse des enjeux complexes, particulièrement pour l'analyse de politiques, il est essentiel d'avoir recours à des approches qualitatives pour éviter de se concentrer prématurément sur un nombre limité d'aspects et d'en négliger d'autres qui pourraient émerger durant la collecte et l'analyse des données.

Après la collecte de données à l'aide de ces outils de recherche, le groupe de travail/groupe d'experts prendra des décisions fondées sur des données probantes au sujet des intervenants concernés par l'enjeu en cause, ce qui prépare le terrain en vue d'une analyse plus poussée de leurs dynamiques et de leurs relations.

2.2.6 Animation d'une séance de remue-méninges

Bryson (2004) décrit ce type d'approche de groupe pour trouver et analyser des intervenants. Dans une séance de remue-méninges, le groupe de travail/groupe d'experts se réunit, et peut même inviter d'autres personnes à se joindre à lui, pour une ou des séances de remue-méninges afin de trouver tous les intervenants possibles. Au cours d'une telle réunion, l'animateur devra :

Intervenant critère
  • utiliser un tableau de papier, un tableau blanc ou un logiciel (par exemple « mind mapping » ou un traitement de textes) pour nommer chaque intervenant;32
  • pour chaque intervenant, créer une feuille ou un document séparé et inscrire son nom en haut de la page;
  • créer une colonne étroite du côté droit de chaque page ou feuille et ne rien écrire dans cette colonne;
  • pour chaque intervenant, dans la section à gauche de la colonne étroite, dresser la liste des critères que l'intervenant utiliserait pour évaluer le projet, la politique ou la réforme de la politique;
  • utiliser des points de couleur pour indiquer le jugement de l'intervenant : bon (vert), moyen (jaune) ou mauvais (rouge);
  • trouver et inscrire ce qui peut être fait rapidement pour satisfaire chaque intervenant;
  • trouver et inscrire les problèmes à long terme avec les intervenants pris individuellement et les intervenants membres d'un groupe.

Étapes additionnelles pouvant être ajoutées à ce stade-ci :

  • préciser l'influence de chaque intervenant sur l'enjeu en question;
  • décider de ce que l'on attend de chaque intervenant par rapport à l'enjeu en question;
  • classer les intervenants en fonction de leur importance relativement à l'enjeu, en prenant en considération le pouvoir, la légitimité et l'influence de l'intervenant. Cela peut aider à la création de catégories d'intervenants primaires et secondaires (avec la possibilité d'ajouter une troisième catégorie pour les intervenants « spéciaux » ou « clés » qui pourraient ne pas cadrer avec les catégories primaires et secondaires, ou de mettre en évidence des membres de la première catégorie particulièrement importants).
2.2.7 Grille « Pouvoir contre intérêts »

Ces grilles (telles qu'elles sont décrites dans Bryson 2004) placent les intervenants sur un plan où les axes sont l'intérêt de l'intervenant pour un enjeu donné et le pouvoir de modifier cet enjeu qu'a cet intervenant. On arrive ainsi à quatre différents « types » d'intervenants : les acteurs qui ont à la fois un intérêt et un pouvoir important; les sujets qui ont un intérêt, mais peu de pouvoir; les déterminants du contexte qui ont le pouvoir, mais peu d'intérêt direct, et la foule constituée d'intervenants ayant peu d'intérêt et de pouvoir. La figure 1 montre une grille complète.

Figure 1 : Grille « Pouvoir contre intérêts »33

Figure 1 : Grille « Pouvoir contre intérêts »

Les grilles « Pouvoirs contre intérêts » peuvent indiquer quels intervenants doivent, de l'avis de tous, prendre part à la résolution en cause. Elles permettent aussi de mettre en évidence les coalitions qui doivent être encouragées ou découragées, les comportements devant être favorisés ou découragés, les intervenants qu'il faudrait tenter de rallier et ceux qu'il faudrait inviter à participer. Finalement, ces grilles fournissent des renseignements sur la façon de convaincre les intervenants de changer d'opinions (Bryson 2004).

2.2.8 Schématisation de l'influence des intervenants

Après avoir rempli la grille « Pouvoirs contre intérêts », la prochaine étape consiste à visualiser les relations et l'influence entre les intervenants et au sein du groupe d'intervenants. Sous la direction d'un animateur, le groupe de travail/groupe d'experts peut :

  • faire le graphique des lignes d'influence d'un intervenant à l'autre;
  • mettre en évidence des influences bidirectionnelles (en s'efforçant de préciser l'orientation primaire de chaque influence);
  • discuter des relations d'influence qui existent, de leur importance relative et des orientations primaires (Bryson 2004).

L'International Institute for Environment and Development (IIED) (2005) ajoute une dimension différente à la schématisation de l'influence des intervenants, en utilisant une pyramide pour situer les intervenants. Plus un intervenant est prêt de l'enjeu, qui se situe à la pointe de la pyramide, plus il a d'influence. De plus, ce type de diagramme permet au groupe de travail/groupe d'experts de voir la taille relative des intervenants (en fonction de leur nombre ou de leur pouvoir) ainsi que les liens entre les intervenants. La figure 2 en donne un exemple.

Figure 2 : Schématisation de l'influence des intervenants34

Figure 2 : Schématisation de l'influence des intervenants

L'IIED (2005) suggère neuf étapes pour préparer un tel triangle; elles sont similaires à celles qui sont utilisées pour préparer la grille « Pouvoirs contre intérêts ». La figure 3 montre un exemple de triangle qui convient à l'établissement de priorités nationales pour la recherche en santé.

Figure 3 : Schématisation de l'influence des intervenants pour un programme national de recherche en santé

Figure 3 : Schématisation de l'influence des intervenants pour un programme national de recherche en santé
2.2.9 Diagrammes sur l'interrelation entre les enjeux et les intervenants

Pour compléter la schématisation de l'influence des intervenants, il existe des diagrammes qui montrent les liens entre des intervenants particuliers et des enjeux donnés; ces diagrammes peuvent mettre en évidence des relations avec d'autres intervenants qui ont aussi un lien avec le même enjeu. Comme le constate Bryson (2004), les diagrammes qui en résultent aident à fournir une structuration importante du domaine qui pose problème, dans lequel un nombre de secteurs réels ou potentiels de coopération – ou de conflit – peut devenir évident. Le travail en groupe devrait commencer par l'établissement d'une grille « Pouvoirs contre intérêts » et/ou une schématisation de l'influence des intervenants, suivi d'un remue-méninges sur les enjeux en cause et sur la façon dont les intervenants abordent ces enjeux.35

Figure 4 : Diagramme sur l'interrelation entre les enjeux et les intervenants36

Figure 4 : Diagramme sur l'interrelation entre les enjeux et les intervenants

3. Obtenir la participation des intervenants

En ayant une meilleure idée des intervenants qui peuvent être les acteurs primaires et secondaires dans un processus donné d'établissement des priorités, nous pouvons examiner les mécanismes pour obtenir leur participation. Reconnaissant que, pour chaque intervenant, l'étendue des connaissances, l'intérêt pour le processus d'établissement des priorités et les moyens d'expression sont différents, il faut porter une attention particulière à la façon de solliciter leur participation. De plus, comme la sollicitation des intervenants coûte cher et nécessite beaucoup de temps, il est approprié de se demander qui doit participer et comment – principalement lorsque les questions et les enjeux de recherche deviennent de plus en plus techniques.

La présente section met en évidence trois outils particulièrement utiles pour obtenir la contribution des intervenants en préparation à un dialogue délibérant. Ces outils peuvent fournir de l'information ou des données brutes en vue du dialogue comme tel (surtout pour enrichir les documents déjà distribués); orienter le contenu et la structure du dialogue; fournir une tribune à ceux qui ne peuvent pas participer au dialogue (en raison de contraintes financières ou géographiques); assurer l'anonymat sur des questions délicates, et préciser comment divers intervenants peuvent mieux participer au dialogue.

3.1 Schématisation conceptuelle

Parfois appelée « conceptualisation structurée », la schématisation conceptuelle est un outil participatif qui combine le remue-méninges organisé à l'analyse statistique pour créer une aide visuelle pouvant être utilisée pour démarrer, planifier, orienter ou même évaluer les délibérations (Novak et Cañas 2008, National Cancer Institute 2007). La schématisation conceptuelle commence par une question clé ou un message-guide qui isole le problème ou l'enjeu pouvant être traité par schéma conceptuel. Selon Novak et Cañas (2008), tout schéma conceptuel répond à une question clé, et une bonne question clé peut mener à un schéma conceptuel beaucoup plus riche. Les organisateurs peuvent envoyer cette question clé à un grand nombre d'intervenants pour leur permettre d'en délibérer en privé, ou convoquer une réunion pour en discuter. D'une manière ou d'une autre, cela peut être un outil très utile pour susciter la participation des intervenants et, ensuite, présenter visuellement leurs commentaires.

Après le remue-méninges initial, c'est-à-dire une fois que les intervenants ont répondu à la question clé – les organisateurs regroupent ces réponses en concepts, leur nombre peut varier de 15 à 25. On établit une liste de ces concepts et, ensuite, on les classe par ordre en allant des concepts les plus généraux, ou plus inclusifs, aux concepts plus particuliers pour une situation ou un problème donnés. Les concepts généraux sont placés en haut de la liste alors que les concepts particuliers sont au bas de celle-ci. Bien que cette classification soit seulement approximative, elle permet de commencer la construction du schéma. Nous appelons cette liste de concepts, le stationnement, puisque nous déplacerons ces concepts pour les placer dans le schéma au fur et à mesure que nous trouverons la place qui leur convient. Certains concepts peuvent rester dans le stationnement, si on ne voit aucun lien entre ces concepts et ceux qui sont dans le schéma. (Novak et Cañas 2008).

Un schéma préliminaire devrait montrer les liens entre les concepts et suggérer des façons de combiner ou d'opposer des idées. Ce schéma peut être une aide visuelle que l'on apporte au moment des discussions ou pourrait, par exemple, être affiché en ligne pour une révision et un repositionnement des concepts; le schéma « final » est l'outil ultime qui oriente l'établissement des priorités.

Figure 5 : Diagramme de schématisation conceptuelle

Figure 5 : Diagramme de schématisation conceptuelle

Le lecteur trouvera ci-dessous une étude de cas du National Cancer Institute (2007) décrivant comment la schématisation conceptuelle a permis d'obtenir l'opinion d'intervenants importants sur le message-guide :

Figure 6 : Schématisation conceptuelle38

Figure 6 : Schématisation conceptuelle

Utilisé dans le contexte de l'établissement des priorités, le schéma conceptuel de la figure 6 pourrait fournir un bon point de départ à un dialogue délibérant. Voici des caractéristiques du schéma conceptuel particulièrement utiles à l'établissement des priorités :

  • la sollicitation anonyme et scientifique des opinions des intervenants donne un poids égal à chaque voix et élimine les écarts de pouvoir entre les intervenants;
  • le schéma contextuel peut être réalisé à distance, ce qui permet de réduire les coûts des réunions et d'assurer la participation d'un plus grand nombre de personnes (par exemple, les personnes ayant un horaire chargé ou celles qui vivent dans les régions rurales ou éloignées);
  • le groupement thématique des opinions des intervenants, y compris les liens entre les thèmes et la taille relative des thèmes, permet de saisir les intérêts des intervenants et ainsi d'établir des paramètres thématiques pour le dialogue;
  • le sommaire des enjeux, court et visuel, oriente le dialogue délibérant et influe sur celui-ci (c'est un document idéal à faire circuler avant le dialogue).

3.2 La technique Delphi

Il s'agit d'une méthode fréquemment utilisée pour obtenir et synthétiser des opinions et des jugements sur un sujet, un enjeu ou un thème au moyen d'une série de questionnaires successifs, de sommaires d'information et de rétroaction (Delbecq et al. 1975). Bien qu'elle soit surtout utilisée pour intégrer les jugements et la rétroaction de petits groupes d'experts, la technique Delphi peut être utilisée avant un dialogue délibérant pour mieux comprendre les enjeux et commencer la synthèse préliminaire des idées, des considérations et des priorités (McDonald, Bammer et Deane 2009). Tout comme la schématisation conceptuelle, la technique Delphi est souvent réalisée de façon anonyme – ce qui pourrait être un facteur important de son succès.

De façon générale, la technique Delphi concerne trois groupes :

  • les organisateurs qui conçoivent les questions et les approches générales, résument les réponses et préparent les questions subséquentes;
  • les experts ou les personnes interrogées qui répondent aux questions des organisateurs et font part de leur jugement;
  • les décideurs qui interviennent après avoir reçu des conclusions ou des recommandations établies par consensus, grâce à la technique.

Figure 4 : La technique Delphi40

Figure 4 : La technique Delphi

En tant que phase préliminaire du processus d'établissement des priorités, la technique Delphi peut être particulièrement utile pour :

  • obtenir l'opinion d'un grand nombre d'intervenants différents, et ce, de façon anonyme et répétitive – cela peut aider à amplifier et à renforcer les voix de ceux qui, habituellement, ne pourraient participer en raison des écarts et des dynamiques de pouvoir;
  • intégrer les « participants virtuels » : tout comme le schéma contextuel, la technique Delphi peut être réalisée à distance, ce qui permet de réduire les coûts des réunions et d'assurer la participation d'un plus grand nombre de personnes (par exemple, les personnes ayant un horaire chargé ou celles qui vivent dans les régions rurales ou éloignées);
  • raffiner les opinions grâce à plusieurs séries de comptes rendus, d'évaluations et de révisions – ce qui est particulièrement utile pour les questions/options/enjeux de recherche très complexes ou techniques;
  • fournir un solide point de départ au dialogue délibérant, puisque certains enjeux ou points complexes auront déjà été résolus.

3.3 La technique du groupe nominal

Il s'agit d'un outil principalement utilisé pour regrouper les connaissances et arriver à un classement d'idées, de considérations et/ou de priorités qui sont acceptées et considérées légitimes par un groupe donné (McDonald, Bammer et Deane 2009). Cette technique est très structurée et par conséquent, elle est plus efficace dans un milieu encadré; contrairement à la technique Delphi ou à la schématisation conceptuelle, ce n'est pas un outil qui peut être utilisé de façon anonyme et à distance, ce qui peut présenter à la fois une force et une faiblesse. Elle peut être appliquée en deux phases : exploration des connaissances (recherche des principaux cadres conceptuels et compréhensions élargies) et exploration de solutions (raffinement de compréhensions élargies par la spécification de composantes qui devraient être incluses dans le programme de solution) (McDonald, Bammer et Deane 2009).

Tout comme la technique Delphi, la technique du groupe nominal (TGN) donne une voix égale à chaque participant, ce qui réduit ou élimine les écarts de pouvoir possibles entre les intervenants. De plus, puisque la NGT nécessite des rencontres face à face, cela permet de mieux comprendre les opinions et les jugements des autres.

Figure 5 : La technique du groupe nominal42

Figure 5 : La technique du groupe nominal

En tant qu'outil du processus d'établissement des priorités, la technique du groupe nominal est particulièrement utile pour :

  • atteindre un consensus sur des enjeux très complexes;
  • favoriser la participation et la créativité, tout en élargissant les perceptions des principaux points dans des secteurs définis;
  • déterminer et analyser les priorités initiales (McDonald, Bammer et Deane 2009).

4. Organiser des dialogues délibérants

Il y a plusieurs façons d'organiser un dialogue délibérant. Dans certaines situations, la meilleure façon est aussi la plus simple : un président neutre anime une réunion des « bons » intervenants (reconnus grâce à une analyse des intervenants), chacun a lu les documents qui lui ont été remis au préalable (certains de ces documents étant le fruit des techniques susmentionnées pour susciter la participation des intervenants) et on s'entend sur une liste de priorités soupesées et classées à des fins de dissémination élargie, d'examen et de révision. Toutefois, selon le contexte et les intervenants concernés, certains mécanismes de dialogue pourraient être plus efficaces pour comparer et synthétiser les différentes opinions, et finalement permettre de dresser une liste exhaustive des priorités pour influer davantage sur la prise de décisions.

Tout dialogue délibérant et multilatéral devrait suivre les principes suivants :43

  • le processus devrait encourager la multiplicité des voix, l'écoute étant aussi importante que la parole, et la conversation plus « horizontale » que « verticale » (c'est-à-dire entre égaux);
  • un grand nombre d'opinions devraient être entendues et faire l'objet d'une discussion avant la prise de toute décision ou résolution;
  • la discussion devrait surtout porter sur l'analyse et les arguments motivés. L'important travail qui se produit au cours du dialogue – la reconnaissance des liens entre les considérations personnelles et publiques, la création d'une compréhension mutuelle, l'établissement de relations fondées sur la confiance – est nécessaire pour résoudre des problèmes publics complexes (McCoy et Scully 2002).
Principes du dialogue délibérant et multilatéral

En passant en revue le processus interprétatif d'établissement des priorités idéal décrit à la section 2 du présent module, nous constatons qu'il y a (au moins) trois différentes étapes où un dialogue délibérant peut être organisé : au début du processus (étape 1), où un petit groupe se réunit pour planifier les diverses étapes du processus; durant les ateliers interprétatifs où le petit groupe dresse la première liste des priorités (étape 4); et durant l'atelier de publicisation et de validation, où la liste initiale des priorités est soumise à un groupe de référence élargi pour la validation, le dialogue et la révision (étape 6).

Puisque le groupe de travail technique utilisera des techniques de dialogue délibérant différentes de celles qu'utilisera le groupe de référence élargi dans le cadre du processus d'établissement des priorités, nous avons divisé l'information qui suit en fonction de ces deux groupes et présentons les techniques de délibération qui conviennent à chacun d'eux.

4.1 Le groupe de travail technique – Formation, leadership, adhésion

Au coeur de tout processus interprétatif d'établissement des priorités idéal, on trouve un petit groupe de chefs – parfois appelés équipe de consultation principale, comité consultatif ou groupe d'aînés – chargés de superviser l'ensemble du processus. Comment ces groupes se forment-ils? Comment peuvent-ils diriger efficacement un processus réel d'établissement des priorités?

4.1.1 Visualisation dans la planification participative

La visualisation dans la planification participative est un outil extrêmement utile pour créer des groupes hétérogènes, établir des liens entre les membres de ces groupes et susciter le meilleur de chacun d'eux. La visualisation dans la planification participative tire parti des dynamiques de groupes par l'utilisation de diagrammes, de cartes et de photographies pour exprimer les idées principales, ce qui permet aux participants « moins bavards » de trouver un moyen d'expression, et au groupe d'atteindre un consensus véritable et efficace. Un animateur expert doit guider le groupe durant la structuration de la visualisation dans la planification participative.

La méthode vient de processus éducatifs utilisés en Allemagne et en Amérique latine, mais elle a d'abord été élaborée par l'UNICEF qui l'a mise en oeuvre au Bangladesh (McKee et al. 2009). C'est une méthode exceptionnelle pour les processus de groupes, puisqu'elle place les gens au coeur de la résolution des problèmes de développement et de société et leur donne une nouvelle vision collective de l'avenir. Cette méthode est exceptionnelle, car elle combine de façon créatrice différentes approches participatives en mettant l'accent sur les techniques de visualisation (McKee et al. 2009). La méthode s'appuie sur les travaux de Bruce Wayne Tuckman (1965) qui a décrit comment des groupes se réunissent et s'est demandé si le conflit pour devenir un ensemble cohésif permettait de prendre des décisions générales par consensus. Selon l'explication de Smith (2005) sur ces dynamiques de groupe, il est clair que les membres ont tendance à vouloir en savoir davantage sur les autres membres; qu'ils doivent atteindre un degré d'interdépendance pour que le groupe ou l'équipe puisse réaliser ses tâches et satisfaire ses membres, et que, dans une certaine mesure, ils doivent apprendre à faire face aux conflits si le groupe doit survivre. Ce point est illustré par les cinq étapes de la formation d'un groupe décrites par Tuckman :

  1. Formation – À ce stade, les groupes se préoccupent surtout de l'orientation réalisée principalement par la mise à l'épreuve (Tuckman, 1965). Cette orientation et cette mise à l'épreuve permettent aux membres du groupe de comprendre les comportements interpersonnels et les comportements centrés sur la tâche tout en établissant des relations avec les autres membres et en devenant de plus en plus à l'aise avec le chef du groupe.
  2. Rébellion – À cette étape, les groupes sont souvent caractérisés par les conflits et la polarisation au sujet d'enjeux interpersonnels (Tuckman, 1965). Il peut y avoir de la résistance, car les personnalités se battent pour déterminer la ligne de conduite et les activités du groupe.
  3. Normalisation – À cette étape, les groupes ont tendance à surmonter les conflits antérieurs et à développer un sentiment de cohésion et d'appartenance au groupe. On a de nouveaux rôles et de nouvelles normes, et l'atmosphère plus chaleureuse favorise l'expression des opinions.
  4. Exécution – À cette étape, les rôles sont établis tout en étant flexibles; le travail du groupe est clair et bien compris; la structure du groupe peut maintenant appuyer l'exécution des tâches (Tuckman, 1965), et les principaux objectifs du groupe peuvent être atteints de façon significative et durable.
  5. Fin des travaux – Bien que cette dernière étape ne soit pas mentionnée par Tuckman, elle concerne nécessairement la dissolution du groupe; les tâches essentielles sont terminées, et une feuille de route a été établie pour l'avenir et peut être mise en oeuvre.

Application de la méthode de visualisation dans la planification participative. Photographies prises par Cole Dodge (2009) lors d'une réunion d'un groupe de travail technique en Zambie (discussion de la création d'un conseil national de recherche en santé en Zambie). Pour en savoir davantage sur ce projet, consultez le site web suivant.

Photo pris par Cole Dodge (2009) lors d'une réunion d'un groupe de travail technique en ZambiePhoto pris par Cole Dodge (2009) lors d'une réunion d'un groupe de travail technique en Zambie

4.1.2 Groupe de témoins experts

Une fois que le GTT a atteint une certaine cohérence – avec une vision claire de l'objectif, du travail d'équipe et de la portée du problème ou de l'enjeu en cause – de nombreuses techniques participatives peuvent être utilisées pour ajouter des éléments importants au remue-méninges du groupe. Le groupe de témoins experts est un outil participatif qui permet de bien intégrer les voix des personnes qui ont des connaissances particulières, mais qui ne peuvent ou ne doivent pas être membres du GTT en raison d'un horaire chargé ou d'un conflit institutionnel. Pour organiser un groupe de témoins experts, le GTT procède à un remue-méninges sur les experts qui pourraient éclairer leurs discussions; invite un nombre désigné d'experts à une réunion du GTT à un moment précis; ensuite, les experts témoignent individuellement devant le GTT, alors que deux membres du GTT, à la fois, sont assis devant l'expert et lui posent des questions spécifiques (pour orienter la réflexion du GTT au complet); une fois qu'un membre du GTT a posé sa question, il retourne avec le reste du groupe et est remplacé par un autre membre du GTT. Une fois que toutes les entrevues avec les témoins experts sont terminées, le GTT fait la synthèse des résultats et se sert de ces connaissances pour la prise de décisions.

Dans les processus d'établissement des priorités, le groupe de témoins experts peut être très utile en tant que préliminaire aux ateliers interprétatifs officiels pour obtenir des avis sur les critères d'évaluation des priorités, sur les autres priorités à considérer ou sur le processus global comme tel, et en tant qu'outil général pour élargir l'approche et la réflexion du GTT. Le groupe présente aussi un autre avantage : lorsque les membres du groupe parlent de leurs travaux à un auditoire d'élite (par exemple, les messages que chaque expert rapporte à son établissement), cela a pour effet d'étendre la prise en charge collective du processus puisque les gens ont plus de chance d'accepter les résultats d'un processus lorsque l'on a tenu compte de leurs opinions au cours de ce processus.

Pour en savoir plus sur les techniques de délibération au cours d'ateliers interprétatifs, consultez l'exposé sur le processus interprétatif d'établissement des priorités idéal à la section 2.

4.2 Groupe de référence élargi – vaste délibération entre de nombreux intervenants

Une étape importante du processus interprétatif consiste à soumettre les priorités initiales à un plus vaste groupe d'intervenants pour s'assurer que celles-ci correspondent à leurs valeurs et à leurs besoins. Ce groupe de référence élargi (GRE) amène toute une série de composantes essentielles aux dialogues délibérants. Le GRE est plus représentatif que le GTT, en raison de sa taille importante; il peut inclure plus de membres du public et par conséquent, des idéaux plus démocratiques; il crée un sens commun et ouvre de nouvelles possibilités de compréhension; il joue un rôle essentiel dans la dissémination de la liste des priorités et du processus d'établissement des priorités comme tel, et il peut ajouter une crédibilité scientifique et sociale à des processus élargis de prise de décisions.

Selon Kapiriri et al. (2007), la taille et la composition réelles du GRE seront fonction des options de recherche à considérer et des ressources disponibles, ce qui inclut le temps. Les intervenants peuvent être représentés par un groupe de référence élargi raisonnablement petit ou très grand, selon le contexte. Par exemple, le groupe peut comprendre seulement 10 personnes (les principaux donateurs d'un organisme de bienfaisance privé qui veulent participer à la prise de décisions concernant l'investissement de leur argent) ou plus de mille personnes (dans le cas de la recherche pour contrer la mortalité infantile à l'échelle mondiale où les intervenants potentiels peuvent être toute personne représentant le public des pays en développement, des fondations de donateurs publiques et privées, ou des organismes des Nations Unies tels que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et l'UNICEF.

La technique du groupe nominal et la technique Delphi sont deux bons outils pour les délibérations qui peuvent être utiles au GRE, étant donné que la principale fonction du GRE est de classer – qu'il s'agisse de critères ou de priorités. Les délibérations à l'aide de ces techniques peuvent être amorcées virtuellement et conclues au moment d'une réunion.

4.3 Autres modèles de dialogue délibérant

Plusieurs autres modèles suggèrent des façons d'organiser un dialogue délibérant. Certains peuvent ne pas convenir à l'établissement de priorités, mais peuvent se prêter à d'autres discussions au sein d'un système national de recherche en santé. Les modèles présentés ci-dessous sont traités en détail dans McDonald, Bammer et Deane (2009) :

  • Conférences consensuelles – Ce sont des événements très structurés conçus pour faire participer des non-spécialistes et des citoyens non partisans à des délibérations sur des questions de planification et/ou des enjeux importants (et habituellement complexes) sur le plan social, technique et/ou politique et, ainsi intégrer leurs jugements. L'objectif des conférences consensuelles est de réduire l'écart entre le grand public, les experts et les politiciens. Voici les principales caractéristiques de ces conférences : un échantillon représentatif constitué d'un petit nombre de participants (de 12 à 25); un animateur habile; les participants reçoivent les documents écrits avant la rencontre; les participants choisissent le témoin expert qui sera appelé; les conférences sont interactives, les participants se rencontrent pour une fin de semaine préparatoire et enfin pour une rencontre délibérante de 2 à 4 jours; les recommandations sont publiées dans un rapport officiel; soit les recommandations sont mises en oeuvre, soit il faut offrir publiquement suffisamment de raisons expliquant pourquoi elles ne sont pas mises en oeuvre (McDonald, Bammer and Deane 2009).
  • Groupes pour l'atteinte d'un consensus – Ces groupes ont pour but de fournir une orientation dans les domaines de la médecine et des pratiques en matière de santé, particulièrement sur des questions controversées pour lesquelles il y a des données scientifiques dont on peut évaluer la portée et qui peuvent être examinées, évaluées et synthétisées pour produire un énoncé consensuel sur une question donnée. Le processus des groupes pour l'atteinte d'un consensus a été mis au point par les National Institutes of Health des É.-U. qui l'utilisent régulièrement. Il s'agit d'une approche très structurée pour intégrer les résultats de la recherche scientifique venant de différentes disciplines. L'essence du processus consiste à juger les résultats et à atteindre une position consensuelle qui est ensuite communiquée aux professionnels de la santé et au public, dans un langage non technique. (McDonald, Bammer and Deane 2009).
  • Assemblées publiques – Une réunion d'une journée et demie comprenant un symposium scientifique et une discussion ouverte pour les membres de la communauté est, jusqu'à ce jour, la meilleure formule pour organiser une assemblée publique. La réunion entière est ouverte à la participation de la communauté, bien que les participants les plus actifs durant le symposium scientifique soient les chercheurs, les fournisseurs de soins de santé et les responsables de la santé publique qui veulent être informés des derniers résultats de la recherche dans ce domaine particulier. La discussion ouverte est organisée précisément pour encourager et faciliter les commentaires et les questions des membres de la communauté. C'est pourquoi la discussion a lieu à un moment et à un endroit qui favorisent une plus grande participation de la communauté; les experts font un bref exposé sur la recherche, la politique et la santé publique avant de donner la parole aux membres du public. Les experts répondent aux questions et aux commentaires soulevés. Parfois, les organisateurs invitent un politicien de la scène locale ou fédérale, un présentateur-vedette de la télévision locale ou un expert en communication pour animer la réunion. Souvent, cette stratégie rend la réunion plus intéressante et attire un plus vaste auditoire (Olden 2003).
  • Conférences Future Search – Il s'agit de conférences de planification regroupant un grand nombre d'intervenants au cours desquelles, on a recours à un dialogue face à face pour élaborer des plans, et notamment définir les prochaines étapes. Les conférences Future Search sont particulièrement utiles dans les situations où des changements surviennent rapidement (changements concernant les connaissances, la société, la technologie, l'environnement) et lorsque l'on peut s'attendre à ce que divers intervenants prennent différentes décisions sur les répercussions du changement pour l'avenir. On commence ces réunions en portant une attention particulière sur les visions et on utilise ces dernières pour orienter les propositions d'interventions. Les méthodes d'application varient. Certains adeptes de cette technique prétendent qu'il faut limiter le nombre de participants (de 60 à 80), réunis dans une salle pour un dialogue actif, car ils sont convaincus qu'il n'est pas possible d'avoir un dialogue productif si le nombre de participants est plus élevé. D'autres sont à l'aise avec un nombre de participants beaucoup plus élevé; dans ces cas, les participants sont divisés en petits groupes. Au cours de ces conférences, les tâches sont exprimées comme suit « l'avenir de X est Y… », et les conditions pour réussir sont les suivantes :
    • réunir « tout le système » dans la salle; inviter un échantillon représentatif de toutes les parties concernées par les résultats de la conférence;
    • examiner la situation globale avant de tenter d'en corriger certains aspects; faire en sorte que les participants soient sur la même longueur d'onde; examiner la situation mondiale avant de se concentrer sur des enjeux locaux;
    • mettre l'accent sur un point d'entente et les orientations futures, en traitant les problèmes et les conflits comme de l'information, et non comme des questions à régler;
    • encourager l'autogestion et la responsabilité des interventions par les participants avant, durant et après la conférence. (McDonald, Bammer, Deane 2009).
  • Processus de groupe forum ouvert – Cet outil peut aider des groupes à cerner et à explorer des enjeux, à trouver des possibilités de changement, et à définir et à établir des priorités parmi les actions requises pour atteindre les objectifs désirés. L'approche est fondée sur les théories de la complexité, de l'auto-organisation et des systèmes ouverts. La disposition des chaises en un ou plusieurs cercles, chaque cercle étant considéré comme la géométrie fondamentale de la communication humaine, constitue un élément clé du processus. La salle doit être suffisamment grande pour permettre à un grand nombre de petits groupes de s'asseoir en cercles et de changer la configuration de cercles au fur et à mesure que le processus se déroule. L'animateur explique le processus : peu importe qui se présente, c'est la bonne personne; peu importe ce qui se produit, c'est la seule chose qui peut se produire; peu importe quand cela commence, c'est le bon moment; quand c'est terminé, c'est terminé. L'animateur demande ensuite aux participants de se placer au centre du cercle, de se présenter et de dire au groupe quel est le thème de la séance qui les passionne. Le participant écrit sur une grande feuille de papier, l'aspect mentionné, son nom ainsi que l'endroit et le moment suggérés pour discuter de cette question et place la feuille sur le mur. C'est ainsi que l'ordre du jour préliminaire évolue… Lorsque tous les sujets de discussion ont été affichés, les participants choisissent les groupes avec qui ils désirent travailler. À cette étape, les sujets peuvent être combinés. Une fois cette étape terminée, l'animateur annonce qu'il quitte la salle et invite les groupes à se mettre au travail. Le processus de groupe forum ouvert est efficace dans les situations où divers groupes de personnes doivent traiter de questions complexes et potentiellement conflictuelles, et ce, de manière novatrice et productive. Le processus est particulièrement efficace lorsque personne ne connaît la réponse et que la participation continue d'un grand nombre de personnes est requise pour traiter des questions en cause. Le processus oblige les participants à oublier leur poste de pouvoir au sein des hiérarchies organisationnelles et à interagir sur un pied d'égalité avec les autres. La philosophie qui sous-tend le processus est la suivante : il est possible d'arriver à une synthèse au moyen de discussions en petits groupes par des personnes qui ont décidé de se pencher sur un sujet qui les passionne. L'intégration est une caractéristique émergente de ce processus de groupe. (McDonald, Bammer et Deane 2009).
  • Groupe de citoyens – Le concept de groupe de citoyens s'apparente à celui du groupe de témoins experts. Un groupe de citoyens est constitué de 18 à 24 personnes non spécialistes, choisies au hasard, qui se réunissent pour interroger des témoins et délibérer collectivement sur un enjeu. Ils sont représentatifs – car ils sont choisis à l'aide d'une méthode d'échantillonnage reconnue; informés – puisque les témoins experts leur présentent une variété de faits, de renseignements et d'opinions sur le sujet à l'étude et qu'ils répondent aux questions du groupe de citoyens; impartiaux – les organisateurs du processus choisissent des témoins dont les témoignages sont soupesés rigoureusement pour s'assurer que tous les aspects d'un enjeu sont traités équitablement; délibérants – les groupes de citoyens délibèrent de diverses manières, et on leur accorde suffisamment de temps pour considérer toutes les opinions des membres. (McDonald, Bammer et Deane 2009). Habituellement, le groupe de citoyens conclut ses délibérations en formulant des recommandations pour l'avenir. De nombreux auteurs, notamment Price (2000) ainsi que Lenaghan et al. (1996), ont étudié le recours à des groupes de citoyens dans l'établissement de priorités pour la prestation de services.

Section 4 : Établissement des priorités et l'intervenant délibérant

Comment des techniques de délibération peuvent-elles améliorer les processus d'établissement des priorités, surtout dans les pays à revenu faible et intermédiaire? Quelles mesures les établissements et les systèmes doivent-ils prendre pour insuffler la délibération à leurs processus d'établissement des priorités?

Pour insister de nouveau sur l'élément central du présent module, ajoutons que le concept de dialogue délibérant offre une variété de moyens pour déterminer qui sont les « bons » intervenants et les faire participer à l'établissement des priorités – non seulement ceux qui sont consultés, mais aussi ceux qui jouent un rôle actif dans le processus. Bien que Rudan et al. (2007b) voient « l'option de recherche en santé » comme un ajout essentiel à la théorie sur l'établissement des priorités, nous avançons que le concept « d'intervenant délibérant » est une composante absente ou dissimulée dans les processus d'établissement des priorités. Les valeurs et les critères des intervenants orientent tout le processus d'établissement des priorités; tout processus qui tente d'évaluer les besoins en connaissances d'une société et de répondre à ces derniers doit porter une attention particulière sur les intervenants en cause et sur leur façon de participer au processus. Lorsque cet aspect est négligé, l'établissement des priorités revient aux experts techniques et aux scientifiques, qui ont souvent des valeurs et des critères très différents de ceux des autres intervenants concernés (Kapiriri et al. 2007). L'établissement des priorités doit commencer par un recensement exhaustif et une analyse complète des intervenants concernés afin de comprendre leurs valeurs, leurs intérêts et leurs dynamiques. Il faut ensuite mettre en oeuvre des moyens pour obtenir la participation des intervenants (en particulier, des moyens virtuels ou à distance). Finalement, après avoir évalué le contexte général ainsi que les valeurs et les dynamiques des intervenants, il faut soupeser et synthétiser leurs contributions en ayant recours à des techniques de délibération appropriées

Cette approche à trois volets – trouver des intervenants, favoriser leur participation et délibérer – est essentielle au succès de tout processus interprétatif d'établissement des priorités. Comme d'autres techniques d'AC, une telle approche reconnaît le caractère social de l'établissement des priorités et lui accorde de l'importance – cela en fait une approche fondée sur les relations et la confiance. Plus un processus d'établissement des responsabilités se déroule sous cet éclairage – en tant que mécanisme itératif, délibérant et fondamentalement social – plus il y a de chances que les priorités d'une société correspondent à ses valeurs et que l'affectation de ses ressources corresponde à ses besoins.

Trouver des intervenants à favoriser leur participation à délibérer

Expérimentation, essai et évaluation

Cela dit, il y a encore beaucoup d'inconnu, en ce qui concerne l'établissement des priorités. Nous devons expérimenter et essayer; nous devons comprendre quelles techniques sont efficaces, pour qui et dans quelles circonstances – surtout lorsqu'il s'agit d'évaluer les liens entre les techniques de délibération et les priorités établies; entre la participation des intervenants et les types de priorités définies (Ranson et Bennett 2009), et entre les processus d'établissement des priorités et la prise de décisions comme telle (Smith et al. 2009). Nous avons déjà un bon cadre d'évaluation pour l'établissement des priorités (par exemple les éléments d'équité, de justice, de délibération, de légitimité, de transparence, de responsabilité et de réalisation du cadre AFR (Accountability for Reasonableness de Daniel) et pour les processus délibérants (suggestions de Abelson et al. (2003) au sujet de la représentation, des procédures, de l'information et des résultats). Compte tenu de la nécessité de comprendre, d'évaluer et de documenter les dynamiques complexes au sein des processus d'établissement des priorités, il faut que des évaluations rigoureuses et novatrices permettent de bien saisir l'expérimentation et les essais dans l'établissement des priorités.

Incorporation des techniques de dialogue délibérant aux processus d'établissement des priorités

Ce ne sont pas tous les processus d'établissement des priorités qui nécessitent la tenue de réunions coûteuses regroupant des intervenants de toutes les régions d'un pays. Il existe des possibilités extraordinaires de raffiner et de faire progresser des outils virtuels tels que la schématisation conceptuelle et la méthode Delphi – pour solliciter la participation de nombreux intervenants et entreprendre les délibérations au sein d'un groupe d'intervenants élargi et plus inclusif. Jusqu'à maintenant, l'établissement des priorités a été un processus mené par des experts; toutefois, c'est l'utilisation accrue de ces outils de délibération qui fera naître de nouvelles perspectives et des idées différentes. Souvent, dans l'établissement des priorités, on oublie de tenir compte des valeurs des intervenants et de leur demander leur opinion; il est maintenant temps d'apprendre comment ces outils ont été utilisés dans d'autres contextes et de les appliquer à l'établissement des priorités, à l'échelle nationale, régionale, provinciale/territoriale et même au niveau de l'organisation.

L'application de ces innovations est encore plus importante pour les ateliers interprétatifs, qui sont au coeur de la plupart des processus d'établissement des priorités. La littérature fait état de nombreux ateliers interprétatifs qui ressemblent à des conférences scientifiques – événements conditionnés par un niveau égal de compréhension scientifique et l'acceptation des raisonnements et des méthodes scientifiques. Si les responsables d'un système national de recherche en santé désirent vraiment qu'un plus grand nombre d'intervenants participent à l'établissement des priorités, le processus doit combiner des approches et des mécanismes de délibération pour niveler le terrain et allier la rigueur et la spontanéité ainsi que les aspects quantitatifs et qualitatifs. Cela ne signifie pas que chaque atelier interprétatif doive ressembler à une assemblée publique, mais que parmi l'ensemble des techniques de délibération exposées dans le présent module, divers éléments puissent être réunis pour trouver des intervenants parmi un vaste échantillon de personnes concernées, de favoriser leur participation et de synthétiser leurs précieuses contributions.

Mettre l'accent sur le processus

En définitive, c'est le processus et non le produit qui compte (OMS 2003). Il est possible que le dialogue ne permette pas de résoudre un problème ou d'établir des priorités réelles, mais il permet d'établir des relations sociales, la confiance et les interactions essentielles à l'AC et à tout système de santé. Si un processus d'établissement des priorités ne permet pas d'arriver à une liste de priorités classées par ordre d'importance, mais qu'il renforce un système maintenant en mesure de reconnaître ses faiblesses et ses possibilités et d'en discuter, ce processus aura plus qu'atteint ses objectifs. Après tout, le but d'un dialogue délibérant n'est pas de résoudre des problèmes (Lavis 2009a), mais de créer une discussion ouverte sur la nature du problème comme tel et de mettre en évidence la complexité réelle du problème (Abelson et al. 2003), ou de le situer dans un cadre systématique élargi. L'idée n'est pas de résoudre, mais de délibérer.

Et les choses évoluent. Nous ne parlons plus du « tiers monde », mais du « monde en développement » ou du « Sud »; nous avons intégré la notion de genre à l'optique de la recherche fondamentale afin de percevoir les relations de pouvoir souvent cachées d'une société. De même, nous devons remplacer le terme « établissement des priorités de recherche » par « orientation des priorités de recherche » afin d'en adoucir la rigidité et la finalité. Nous devons reconnaître que, indépendamment de leur milieu, les acteurs politiques ne sont peut-être pas prêts à céder ou à partager leurs pouvoirs quant à l'établissement des priorités (peu importe qui participe au groupe de travail technique) et qu'il n'est sans doute pas nécessaire de livrer une bataille à ce sujet : c'est le processus et non le produit qui compte. Tous les ministres peuvent établir une série de priorités; cependant lorsqu'un groupe inclusif de personnes unissent leur voix pour discuter des valeurs, des besoins et des préoccupations d'une société, cela est beaucoup plus utile.

Nouvelle façon de produire et d'appliquer les connaissances

Enfin, nous devons reconsidérer la façon dont les connaissances sont produites et appliquées. Cela est essentiel. Pendant beaucoup trop longtemps, le programme de recherche a été dominé par les chercheurs et les bailleurs de fonds alors que le programme de mise en application était dirigé par les responsables des politiques à l'échelle locale, nationale et mondiale. Pour réussir à réduire l'écart entre savoir et faire, il est essentiel que ces deux camps convergent et cela doit se faire en faisant participer un grand nombre d'intervenants concernés. Pour réaliser des progrès réels en AC, pour réussir à renforcer les systèmes nationaux de recherche en santé, nous devons de plus en plus traiter les connaissances comme un bien public aux aspects multiples : elles sont exigées, façonnées et utilisées par les nombreux intervenants qui, depuis toujours, sont censés en bénéficier.

Section 5 : Références

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Notes

  1. Veuillez consulter le Rapport mondial sur les connaissances pour une meilleure santé de l'OMS (2004) pour obtenir une description de ce phénomène, ainsi que la livraison spéciale du Bulletin of the World Health Organization (2004) intitulée Bridging the Know-Do Gap in Global Health (en anglais seulement) qui contient de nombreux articles sur le sujet.
  2. Veuillez consulter aussi Greenhalgh et Russell (2005) qui décrivent la prise de décisions comme le déroulement désordonné d'une action collective réalisée principalement par l'action du dialogue, de la discussion, des influences et des conflits. Lomas (1997) compare la prise de décisions à la fabrication de saucisses : dans un cas comme dans l'autre, on ne veut pas savoir comment cela se passe réellement.
  3. À Mexico, les gouvernements ont été invités à appuyer « les systèmes de santé publique et de prestation de soins fondés sur des données probantes ainsi que les politiques fondées sur des données probantes ». Pour en savoir plus à ce sujet, consultez Hamid et al. (2005).
  4. Consultez Graham et al. (2006) pour une analyse approfondie des définitions et termes principaux du lexique de l'AC. Voici la définition des IRSC : L'application des connaissances est l'échange, la synthèse et l'application éthique des connaissances – dans un système complexe d'interactions entre chercheurs et utilisateurs – pour accélérer la concrétisation des avantages de la recherche pour les Canadiens, à savoir une meilleure santé, de meilleurs produits et services et un système de santé renforcé. Voir le site.
  5. Il ne s'agit pas d'ignorer les autres utilisateurs de la recherche (les médias, le secteur privé, le secteur non gouvernemental et les professionnels de la santé, etc.) – qui sont des éléments et des acteurs essentiels dans la dynamique « recherche et politiques », mais plutôt de mettre l'accent sur la dynamique centrale entre la recherche et les politiques.
  6. Pour en savoir plus sur cette dynamique, consultez Makundi et al. (2007). Consultez aussi Makundi, Kapiriri et Norheim (2007) qui traitent des autres dynamiques politiques, notamment le rôle et l'influence des groupes d'intérêts dominants, des organismes de financement et des différents paliers de gouvernement qui doivent tous faire face à la toile de fond des « systèmes de financement dysfonctionnels ».
  7. Nous tenons à manifester notre gratitude au Dr Pierre Ongolo-Zolo qui, lors d'une communication personnelle, a exprimé une inquiétude bien fondée sur la nature hautement politique du terme « établissement des priorités ».
  8. Reconnaissant les différences significatives entre les approches d'établissement des priorités techniques (centrées sur les données quantifiables, généralement épidémiologiques) et interprétatives (créant un consensus entre les intervenants), nous nous concentrons exclusivement sur l'approche interprétative pour l'établissement des priorités. Pour un examen utile de l'approche technique de l'établissement des priorités, consultez le modèle CAM [Combined Approach Matrix] (Ghaffar et al. 2004), dont il est question à la section 2. Comme le font remarquer Ranson et Bennett (2009), l'approche interprétative pour l'établissement des priorités peut et doit inclure des éléments techniques, à bien des égards, un mélange d'approches quantitatives et qualitatives, tout en favorisant clairement les dernières.
  9. Pour obtenir d'autres définitions de l'établissement des priorités, consultez l'Alliance pour la recherche sur les politiques et les systèmes de santé (2009) qui le définit comme un programme pour générer un consensus au sujet d'enjeux de recherche essentiels qui nécessitent une attention immédiate afin de faciliter l'élaboration de politiques. Rudan et al. (2008) font remarquer que pour certains auteurs, l'établissement des priorités équivaut à « qui obtient quoi aux frais de qui », mais ils le définissent comme une science visant à répondre aux besoins d'une communauté ou d'une société, à un moment précis, en tenant compte de politiques particulières, du contexte, des échéances et des contraintes financières. Le processus repose sur des valeurs, et beaucoup d'intervenants concernés défendront nécessairement des opinions et des valeurs différentes.
  10. Consultez Byskov et al. (2009) pour un exposé sur l'application particulière du cadre AFR à l'initiative africaine REACT (REsponse to ACcountable priority setting for Trust in health systems), et Mshana et al. (2007) pour des détails sur son application en Tanzanie; Daniels (2000) pour un aperçu exhaustif, mais concis du cadre AFR; et Peacock et al. (2009) pour une description générale du cadre AFR. Voyez aussi Hasman et Holm (2005) pour une critique sérieuse du cadre AFR, montrant comment ce cadre n'a pas réussi à décrire le processus réel de l'établissement des priorités, le processus étant une « boîte noire ». Consultez Kapiriri, Norheim and Martin (2007) pour savoir comment le cadre peut guider les évaluations de l'établissement des priorités. En fait, ce dernier élément pourrait être la principale contribution à l'établissement des priorités – critère adaptable pour évaluer n'importe quel processus d'établissement des priorités. Ainsi, dans le processus d'établissement des priorités X, comment les priorités établies reflètent-elles les besoins du contexte local? Comment les critères ont-ils été mis en contexte? Dans le cadre de ce processus, comment les décisions sont-elles publiées? Comment a-t-on créé des mécanismes d'appel dans le cadre de ce processus? Et comment assure-t-on la conformité dans le cadre de ce processus?
  11. Ghaffar et al. (2004) confirment l'invraisemblance de trouver un algorithme qui génère automatiquement des priorités si les données probantes sont, pour une raison ou une autre, fournies dans le processus.
  12. Consultez aussi Rudan et al. (2008) qui suggèrent une excellente liste de questions à considérer pour évaluer des priorités contradictoires – p. ex. justification (quelles sont les chances d'atteindre les objectifs, compte tenu de l'état actuel de la science et de l'importance de l'écart dans les connaissances?), équité (quelles sont les chances que la recherche proposée profite aux plus vulnérables?) et capacité de recherche actuelle (quelles sont les chances d'atteindre les objectifs compte tenu de la capacité de recherche actuelle?)
  13. Pour obtenir des exemples précis de critères choisis lors d'exercices d'établissement des priorités, consultez Rosenstock, Olenec et Wagner (1998) qui décrivent les étapes suivies pour élaborer le programme national de recherche sur la santé au travail aux É.U. (gravité du risque; nombre de travailleurs exposés; possibilité de réduire les risques; recherche actuelle suffisante; tendance prévue dans l'importance du sujet, et probabilité que la recherche change le cours des choses). Consultez aussi González-Pier et al. (2006) qui divisent les critères en fonction de considérations quantifiables (analyses de rapport coût-efficacité, ressources disponibles, problèmes de mise en oeuvre) et qualitatives (y compris une évaluation éthique des répercussions en matière d'équité sur les groupements de population et une discussion de l'acceptabilité sociale).
  14. Kapiriri et al. (2007) fournissent un bon exposé sur le rôle des intervenants dans le processus d'établissement de priorités.
  15. Cette définition s'inspire des auteurs suivants : Gregory, Hartz-Karp et Watson (2008); McCoy et Scully (2002); London (2005); et Lavis et al. (2009b). Bien que la FCRSS (2006) définisse le dialogue délibérant comme « un mécanisme pour obtenir des données informelles tout en les considérant comme accessoires aux données scientifiques » nous ne passons ici aucun jugement sur la hiérarchie des données probantes.
  16. Consultez aussi McDonald, Bammer et Deane (2009), Start et Hovland (2004) et le National Cancer Institute (2007) pour obtenir des exemples de divers types de dialogues. Dans la section 3 du présent module, nous explorerons plus en détails plusieurs de ces types de dialogue. Consultez aussi Martin, Abelson et Singer (2002) pour obtenir une liste des méthodes pour faire participer de nombreux intervenants à l'établissement de priorités – en passant par les approches de masse (tribunes téléphoniques, sondages), les approches ciblées (groupes de consultation), les approches indirectes (entrevues avec des témoins privilégiés) et les participations éclairées (groupe de citoyens).
  17. L'insuffisance d'évaluations rigoureuses du processus d'établissement des priorités accentue l'écart des données – consultez Abelson et al. (2003) ainsi que Smith et al. (2009) pour obtenir un exposé plus complet.
  18. Cette dernière méthode est particulièrement appropriée à l'établissement de priorités pour la prestation de services. Nous l'avons incluse, car elle pourrait être incorporée aux processus d'établissement des priorités de recherche, et son schéma logique pourrait offrir des exemples ou des structures utiles pour plus de processus interprétatifs.
  19. Le processus idéal décrit ici est inspiré de Sibbald et al. (2009); de COHRED (2006); de l'Alliance pour la recherche sur les politiques et systèmes de santé (2009); de Rudan et al. (2007a) et Rudan et al. (2007b); et de l'expérience de l'auteur dans l'élaboration d'un processus pour l'établissement des priorités en Mongolie.
  20. Ce diagramme et tous les autres ont été créés par l'auteur, sauf indication contraire.
  21. Cela peut aussi inclure l'élaboration d'une demande de financement pour le processus.
  22. Pour plus d'information sur l'élaboration d'une stratégie de gestion des connaissances, consultez la Boîte à outils de RM sur l'application des connaissances (2008).
  23. D'après la figure 1 dans Peacock et al. 2009.
  24. Pour en savoir plus, consultez l'Alliance pour la recherche sur les politiques et les systèmes de santé (2009); ElJardali et al. (2010); Walker et al. (2009); Ranson et Bennett (2009).
  25. Adapté de el-Jardali et al. 2010. Permission non requise.
  26. Source : adaptation de l'article de Tomlinson et al. 2007.
  27. Tiré de la figure 1 de Rosenstock, Olenec et Wagner (1998).
  28. inspiré de Lomas et al. 2003.
  29. Adapté de Ghaffar et al. 2004.
  30. Selon Ghaffar et al. 2004.
  31. Inspiré des articles de Mitton et Donaldson (2004) et de Mitton et al. (2003).
  32. Consultez le site web pour obtenir une liste de bons logiciels de schématisation conceptuelle – un outil essentiel pour les séances de remue-méninges.
  33. D'après la figure 3 de Bryson (2004).
  34. Selon l'IIED 2005.
  35. Voir aussi l'outil de réseautage politique (Policy Networking Tool) décrit par Crosby (1992) et l'information plus détaillée dans la Boîte à outils de RM sur l'application des connaissances (2008).
  36. D'après Bryson (2004).
  37. Article accessible en linge. Consulté le 12 avril 2010 NDT : L'article en français diffère de l'article anglais
  38. Tiré d'une publication du National Cancer Institute 2007. Permission non requise.
  39. Article accessible en linge. Consulté le 28 avril 2010. NDT : L'article en français diffère de l'article anglais
  40. Adapté de McDonald, Bammer et Deane (2009).
  41. Article accessible en linge. Consulté le 28 avril 2010.
  42. Selon McDonald, Bammer et Deane 2009.
  43. Adaptation d'une liste fournie par McCoy et Scully, 2002.
  44. Article accessible en ligne. Consulté le 28 avril 2010.
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