COVID-19

Commencer par le « pourquoi » : expliquer l'aspect scientifique de la COVID-19 pour améliorer la santé publique

Dre Holly Witteman

Si vous trouvez que 2020 a été épuisante, levez la main.

(Divulgâcheur : vous n'êtes pas la seule personne à être de cet avis, surtout si vous le dites déjà depuis des mois.)

Malheureusement, la source de tout cet épuisement mental et physique restera parmi nous durant quelque temps. Le SRAS-CoV-2, le virus qui cause la maladie appelée COVID-19, demeure une menace pour la santé humaine partout au Canada et dans le monde entier. Bien que la recherche fasse des progrès tous les jours concernant la mise au point de vaccins et de traitements potentiels, nous devons tous et toutes y mettre du nôtre pour nous protéger, et pour protéger nos êtres chers et nos collectivités.

Cependant, interpréter l'avalanche quotidienne de manchettes portant sur la COVID-19 et de consignes de santé publique peut s'avérer — vous l'aurez deviné — épuisant. En outre, les conseils et les politiques peuvent changer avec le temps à la lumière des faits nouveaux, ce qui peut être frustrant et amener la population à se demander quelles mesures en valent vraiment la peine.

« Les données scientifiques qui sous-tendent les mesures de santé publique ne sont pas toujours expliquées clairement. Et quand les faits ne sont pas clairs, il devient très difficile de créer un lien de confiance et d'encourager les comportements qui nous aideront tous et toutes à faire face à la pandémie et à nous en remettre », affirme la Dre Holly Witteman, chercheuse basée à l'Université Laval et nouvelle titulaire de la Chaire de recherche du Canada en santé numérique axée sur les personnes.

Jusqu'à présent, il existe peu d'études sur les types d'approches en matière de messages et de communication qui fonctionnent bien pour ce qui est de favoriser les changements de comportement durant une pandémie. Par conséquent, les autorités de santé publique ont fort à faire pour essayer de motiver les membres de leurs collectivités à travailler ensemble et à suivre les consignes les plus appropriées. Pour appuyer ces efforts, la Dre Witteman dirige un nouveau projet visant à créer du matériel adaptable relatif à la santé numérique qui aidera la population à mieux comprendre l'aspect scientifique de la COVID-19. Cette année, son laboratoire a élaboré une démonstration interactive visant à expliquer comment la distanciation physique et sociale peut aider à protéger les gens contre le coronavirus. Maintenant, son équipe prévoit élaborer du matériel similaire pour aborder divers sujets, qui vont des raisons pour lesquelles les conseils de santé publique peuvent changer (et ce que veulent dire ces changements) à la façon dont différentes mesures de prévention limitent la transmission communautaire.

« L'un de nos objectifs est d'aborder des éléments qui sèment la confusion ainsi que des sources d'inquiétude, mais nous désirons aussi étudier comment communiquer efficacement sur ces types de sujets complexes afin que les informations importantes atteignent le plus grand nombre de personnes possible et soient bien accueillies par elles. Ce dernier aspect peut être particulièrement ardu, parce que nous parlons de consignes de santé publique qui, bien franchement, créent des difficultés dans la vie des gens. », explique la Dre Witteman.

Ces difficultés peuvent varier selon l'âge d'une personne, son milieu social, ses conditions de vie, sa situation d'emploi et son état de santé. Par conséquent, le projet comprend un panel de citoyens et citoyennes bénévoles de partout au pays qui donneront leur avis sur tous les aspects du projet, depuis la création de ressources jusqu'aux sujets abordés par celles-ci. Les bénévoles diront à l'équipe de recherche comment ces informations s'harmonisent avec ce qu'ils et elles entendent dans leurs collectivités; de son côté, l'équipe de recherche testera le matériel auprès de gens partout au pays pour s'assurer qu'il a l'effet désiré.

Une fois que le matériel relatif à un sujet donné aura été testé pour s'assurer qu'il est exact, compréhensible et convivial, la Dre Witteman prévoit le publier. Tout le matériel sera disponible sans frais pour quiconque possède une connexion Internet, partout dans le monde. Pour élargir sa portée et son accessibilité, le matériel sera créé en français et en anglais, et sous-titré dans huit autres langues.

« Tout le matériel pourra également être adapté par d'autres. Nous avons l'intention de partager la version définitive du matériel ainsi que le code du logiciel pour que les autorités de santé publique, les communicateurs scientifiques, les leaders communautaires et toute autre personne intéressée puissent utiliser et adapter notre travail », note la Dre Witteman.

La Dre Witteman prévoit que la dernière tâche de l'équipe, dans le cadre de ce projet, sera de créer du matériel approprié concernant le vaccin contre le SRAS-CoV-2 — lorsqu'un tel vaccin sera approuvé pour usage au Canada, bien sûr. Lorsqu'un vaccin sera mis à disposition, il ne sera efficace que si un nombre suffisant de personnes se font effectivement vacciner. Si les discussions au sein du public tournent au vinaigre, particulièrement si on cherche à blâmer les autres ou à leur faire honte, les personnes que la vaccination rend nerveuses ou qui ont des questions concernant le vaccin pourraient ne pas savoir vers qui se tourner.

« Avoir des questions est parfaitement raisonnable. Depuis des années, nous disons aux gens qu'ils devraient poser des questions sur leur santé et sur les options disponibles; ce principe devrait certainement rester valable en ce qui a trait à un vaccin contre le coronavirus », affirme la Dre Witteman.

Plus précisément, l'équipe travaillera à élaborer ce que l'on appelle une « aide à la décision pour les patients », c'est-à-dire un outil conçu pour aider les personnes à prendre des décisions en matière de soins de santé qui reposent sur les données de recherche et correspondent à leurs valeurs personnelles. L'outil lui-même sera prêt à incorporer des informations concernant le candidat-vaccin ou les candidats-vaccins qui seront homologués au Canada, y compris des données pertinentes provenant d'essais cliniques de phase 3. Le but est de relier ces informations à ce qui compte pour la personne qui envisage de se faire vacciner et à ses opinions concernant les avantages et risques potentiels.

« Les émotions des gens peuvent jouer un rôle dans leur prise de décision. Il ne s'agit pas seulement des faits; il s'agit de ce que ces faits veulent dire pour eux et pour leur vie », soutient la Dre Witteman.

Créer ce contact avec les gens implique notamment de fournir le « pourquoi » : pourquoi quelque chose fonctionne, pourquoi on leur demande de prendre telle ou telle mesure et pourquoi c'est important. Puisque ces travaux de recherche servent à définir les meilleures façons d'expliquer le « pourquoi » des mesures de santé publique, espérons que nous aurons tous et toutes l'esprit un peu plus tranquille très bientôt.

Date de modification :