Section 3.5.4 : Interventions de vérification et de rétroaction

[ Table des matières ]

Robbie Foy, Université de Leeds
Martin Eccles, Université de Newcastle


Aperçu

  • Vérification des dossiers
    • Buts et définition
    • Types de critères de vérification
    • Établissement des objectifs
    • Questions pratiques
  • Vérification et rétroaction
    • But et définition
    • Théorie
    • Données probantes
  • Sommaire et questions de recherche

Principaux points à l'étude

  • Le fait de mesurer l'adhésion aux recommandations relatives à la pratique clinique permet de relever des lacunes dans leur mise en oeuvre et de mieux définir les priorités futures en matière de transfert des connaissances.
  • La vérification et la rétroaction peuvent améliorer la pratique professionnelle, mais leurs effets sur la pratique clinique sont en général assez limités.
  • Il faut poursuivre la recherche sur les effets de la vérification et de la rétroaction par rapport à d'autres méthodes ainsi que sur les mécanismes et les contextes favorables à ce type d'interventions.

Vérification des dossiers

  • Buts
    • Relever les lacunes et les retards dans la mise en oeuvre de pratiques fondées sur l'expérience clinique.
    • Cerner et préciser ces lacunes.
  • Définition
    • La documentation des soins médicaux est évaluée en fonction d'un critère d'examen : « dossier rempli systématiquement et permettant d'évaluer la pertinence des décisions, des services et des résultats en matière de soins de santé ».

Field, M.J. et K.N. Lohr. Guidelines for clinical practice. From development to use. Institute of Medicine. Washington, National Academy Press, 1992.

Types de critères de vérification

  • Critères explicites
    • Mesures fiables et objectives.
    • Par exemple, les patients qui reçoivent un diagnostic d'hypertension artérielle essentielle se voient souvent offrir une médication lorsqu'ils ont soit une hypertension artérielle persistante de 160/100 mm de Hg ou plus, soit un risque de maladie cardiovasculaire plus élevé en raison d'une hypertension artérielle persistante de plus de 140/90 mm de Hg.
  • Critères implicites
    • Élaborés en fonction de l'opinion de pairs ou d'experts cliniciens quant au traitement à suivre.
    • Souvent plus subjectifs et moins fiables que les critères explicites.
    • Utilisés principalement pour évaluer des processus de traitement complexes ou des résultats indésirables, par exemple le nombre de décès maternels à la suite d'accouchements.

Naylor, C.D. et G.H. Guyatt, au nom du Evidence-based Medicine Working Group. « How to Use an Article About a Clinical Utilization Review », JAMA, 1996, 27518 :1435-9

  • Contexte de prestation des soins
    • Par exemple, présence d'appareils calibrés pour mesurer la pression artérielle.
  • Processus de prestation des soins
    • Par exemple, prescription de médicaments antihypertenseurs.
    • Les critères associés au contexte et aux processus doivent être valables : il a été prouvé qu'une amélioration de ces critères contribue à l'obtention de meilleurs résultats.
  • Résultats pour le patient
    • Résultats à court terme ou résultats de substitution (par exemple, augmentation ou diminution de la pression artérielle).
    • Résultats à long terme (par exemple, un accident vasculaire cérébral).
    • Ne permettent pas nécessairement d'observer des changements dans la pratique, car plusieurs facteurs influencent les résultats pour le patient.
    • Nécessitent en général plus de ressources, des échantillons plus grands et un suivi à plus long terme pour observer des changements importants.

Établissement des objectifs

  • Fixer des objectifs de rendement qui orienteront les décisions concernant la pertinence de mettre en oeuvre des changements.
  • Il pourrait se révéler plus productif de cibler de nouvelles priorités plutôt que d'essayer d'améliorer un rendement déjà élevé.
  • Ne jamais s'attendre à obtenir une adhésion totale.
    • Plusieurs interventions cliniques ont un " plafond " au-dessus duquel leur rendement peut difficilement être amélioré par les systèmes de santé et les cliniciens.
    • Par exemple, les patients admissibles peuvent refuser la médication ou ressentir des effets secondaires indésirables.

Questions pratiques

  • Planification et procédure de vérification
    • Méthode d'échantillonnage
    • Taille de l'échantillon
    • Collecte de données
  • Manque de documentation
    • Les interventions médicales ne sont pas toujours documentées...
    • Mais la documentation fait partie intégrante d'une bonne pratique clinique.

Vérification et rétroaction

  • Objectif
    • Le fait de montrer qu'il existe un écart entre le rendement actuel et le rendement visé motivera les cliniciens et les responsables du système de santé à réduire cet écart par des actions concrètes.
  • Définition
    • « Résumé du rendement en matière de pratique clinique pour une période déterminée », fourni à l'oral ou sur support papier ou électronique.

Jamtvedt, G., J.M. Young et al. « Audit and feedback: effects on professional practice and health care outcomes », Cochrane Database of Systematic Reviews, 2006 (2).

Théorie

  • « Autorégulation »
    • Ce processus permet de fixer des objectifs qui serviront de cadre de référence pour déterminer les changements à effectuer.
    • Le succès de tout changement repose aussi sur la capacité des personnes à modifier leur comportement (par exemple, leurs compétences en pratique clinique) et sur les facteurs extérieurs qui influencent leur comportement (par exemple, des facteurs organisationnels).

Carver, C.S. et M. Scheier. Attention and self-regulation: a control-theory approach to human behavior, New York, Springer-Verlag, 1981.

Données probantes

  • Examen de 118 essais randomisés mené par le Centre Cochrane
    • « La vérification et la rétroaction peuvent améliorer la pratique professionnelle, mais leurs effets sur la pratique clinique sont en général assez limités. »
    • Par exemple, lorsqu'on a mesuré l'écart dans l'adhésion aux pratiques visées, les effets allaient d'une diminution de 16 % à une augmentation de 70 % (médiane : augmentation de 5 %).

Jamtvedt, G., J.M. Young et al. « Audit and feedback: effects on professional practice and health care outcomes », Cochrane Database of Systematic Reviews, 2006 (2).

Comment expliquer une telle variation des effets constatés?

  • Type de support (papier, électronique, à l'oral).
  • Fréquence et durée (par exemple, utilisation ponctuelle ou utilisation continue pour une période donnée).
  • Source (par exemple, un supérieur ou un ordre professionnel).
  • Contenu (par exemple, renseignements concernant les processus de prestation des soins ou les résultats des patients, critères permettant de comparer entre eux des professionnels de la santé, des équipes ou des installations).
  • Recours à plusieurs sources de rétroaction (par exemple, supérieurs ou ordres professionnels).

Incertitudes

  • Rétroaction plus fréquente
    • Effets plus grands, mais…
    • Les coûts élevés des stratégies intensives excèdent parfois leurs avantages.
  • Combinaison des interventions de vérification et de rétroaction et d'autres stratégies
    • Par exemple, des conférences éducatives.
    • L'efficacité de telles combinaisons n'a jamais été mesurée.
  • Manque de comparaisons
    • Peu de comparaisons entre les différents types de rétroaction et entre les interventions de vérification et de rétroaction et d'autres types d'interventions.
    • Difficulté de recommander une stratégie plutôt qu'une autre sur une base purement empirique.

L'importance du contexte

  • Facteurs contextuels
    • Les effets relatifs des interventions de vérification et de rétroaction sont plus importants lorsque l'adhésion à la pratique visée est faible au départ.
  • Nature des comportements visés
    • La motivation des cliniciens à changer leurs pratiques et leur participation aux interventions de rétroaction (participants actifs ou auditeurs passifs) sont importantes, mais…
    • Les effets des interventions de vérification et de rétroaction sont plus importants lorsque les cliniciens considèrent que les recommandations diffèrent des normes en vigueur ou lorsque les recommandations concernent des tâches moins motivantes.

Foy, R., G. Maclennan, J. Grimshaw et al. « Attributes of clinical recommendations that influence change in practice following audit and feedback », J Clin Epidemiol, vol. 55, 2002, p. 717-722.

Palmer, R.H., T.A. Louis, L.N. Hsu et al. « A randomized controlled trial of quality assurance in sixteen ambulatory care practices », Med Care, vol. 23, 1985, p. 751-770.

Sommaire

  • Garder à l'esprit qu'on sait peu de choses sur les contextes favorisant l'efficacité des interventions de vérification et de rétroaction.
  • Faire preuve de jugement dans le choix de ces interventions comme méthode d'AC, en tenant compte des facteurs suivants :
    • résultats obtenus avec cette méthode;
    • « diagnostic » cernant les causes à l'origine des lacunes dans la mise en oeuvre de changements;
    • disponibilité des ressources et des compétences nécessaires.
  • Poser le bon diagnostic fournit, en principe, des fondements logiques pour le choix du type de rétroaction à privilégier.
    • Par exemple, si la pression des pairs exerce une influence déterminante sur la pratique des cliniciens et leur motivation à changer leur comportement, la rétroaction pourrait inclure une comparaison avec les pairs.

Questions de recherche

  1. Par quel(s) mécanisme(s) les interventions de vérification et de rétroaction produisent-elles des effets?
  2. Quels facteurs contextuels (par exemple, le lieu de travail et les caractéristiques des professionnels de la santé) et caractéristiques des comportements cliniques visés neutralisent ou amplifient les effets de la vérification et de la rétroaction?
  3. En quoi les interventions de vérification et de rétroaction, prises seules ou en combinaison avec d'autres interventions, sont-elles supérieures ou inférieures à d'autres types d'interventions visant la modification de comportements?

Foy, R., M. Eccles, G. Jamtvedt et al. « What do we know about how to do audit and feedback? Pitfalls in applying evidence from a systematic review », BMC Health Serv Res, vol. 50, no 5, 2005.

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