Si j’inclus des animaux femelles, dois-je doubler la taille de mon échantillon?

Prendre en compte le sexe dans la recherche animale

Assurer rigueur et reproductibilité

La reproductibilité est un élément clé nécessaire pour faire progresser la recherche en santé. Même si la conception des études est l’un des principaux facteurs de mauvaise reproductibilité, la recherche sur les animaux n’utilise pas toujours des plans efficientsNote en bas de page 1. Il en résulte des pertes économiquesNote en bas de page 2 et le sacrifice inutile de millions de vies animales pour un travail de mauvaise qualitéNote en bas de page 3. Lorsqu’elles sont bien conçues et bien analysées, les études contribuent de façon significative à améliorer la santé humaine et ne sont donc pas un gaspillage de vies animales. Voir le sexe comme un élément de la rigueur et de la reproductibilité dans la recherche animale est l’un des nombreux facteurs qui doivent être considérés.

La taille des échantillons n’a pas à être doublée pour tenir compte des deux sexes

À première vue, il peut sembler que l’inclusion d’animaux mâles et femelles dans une étude oblige à doubler le nombre d’animaux pour mener l’expérience chez chaque sexe. Toutefois, ce n’est pas toujours le cas, car des modèles expérimentaux plus efficaces et plus puissants qui prennent en considération les deux sexes, tout en maintenant un solide contrôle sur la variance, peuvent être utilisés. Bien que la taille des échantillons puisse devoir être légèrement augmentée pour tenir compte du paramètre supplémentaire estimé, elle n’a pas besoin d’être doubléeNote en bas de page 4.

Analyse des expériences

L’information générée par une expérience peut être représentée par la somme de toutes les sources de variation en fonction de la taille de l’échantillon (N)-1 degrés de libertéNote en bas de page 5. À noter que les degrés de liberté pour chaque facteur sont toujours égaux au nombre de niveaux dans ce facteur moins 1. Donc, toute expérience peut être représentée par une version de l’équation suivante (des facteurs et des interactions peuvent être ajoutés ou supprimés au besoin) :

Résultat = Facteur 1 + Facteur 2 + Facteur 1 * Facteur 2 + Erreur

Dans le cas qui nous intéresse, supposons que nous avons deux facteurs : « Traitement » et « Sexe ». « Traitement » est le facteur que nous appliquons aux animaux. « Sexe », c’est le sexe des animaux : mâles ou femelles. « Traitement*Sexe » représente l’interaction entre « Sexe » et « Traitement » (c. à d. voir si le traitement agit différemment chez les mâles vs les femelles). Vérifier l’interaction entre deux facteurs nous permet de déterminer comment chaque niveau d’un facteur varie en relation avec les niveaux de l’autre facteur. L’élément « Erreur » représente toute la variation non expliquée restante après avoir pris en compte la variation due aux autres facteurs. Il est utilisé pour calculer l’erreur type pour les comparaisons de traitementsNote en bas de page 5. En règle générale, des degrés de liberté plus élevés dans le terme de l’équation « Erreur » signifient qu’il y a plus de puissance statistique pour déceler un effet, bien que les rendements diminuent à mesure que les tailles d’échantillon augmentent. On a laissé entendre que les degrés de liberté de l’erreur peuvent raisonnablement se situer entre 10 et 20Note en bas de page 5.

Une comparaison simplifiée : Plan « un sexe à la fois » vs plan factoriel

Plan « un sexe à la fois » : 10 animaux traités vs 10 témoins

Supposons que chaque animal est une unité expérimentale, la taille totale de l’échantillon est de 20, et le nombre total de traitements est de 2. Donc, « Traitement » est un facteur à 2 niveaux, et l’équation suivante peut être utilisée pour représenter l’expérience, le nombre de degrés de liberté étant noté sous chaque terme de l’équation :

Résultat = Traitement + Erreur
   (20-1)           (2-1)           (18)

À noter que, parce que nous avons un sexe seulement, il n’y a pas de terme correspondant à « Sexe » ou à une interaction entre traitement et sexe (« Traitement*Sexe ») dans cette expérience. Donc, ce plan expérimental répond à la question : le résultat diffère t il entre les animaux traités et les animaux témoins? Pour répondre à une question sur les effets du traitement chez le sexe opposé, la même expérience doit être réalisée à nouveau, ce qui signifie que le nombre d’animaux est effectivement doublé, passant à 40. Toutefois, ce plan ne serait pas une façon valide d’examiner si les effets du traitement diffèrent selon le sexe, parce qu’il n’y aurait pas de comparaison directe du facteur « Sexe ».

Plan factoriel 2x2 : Chaque sexe est représenté dans les deux groupes traités

Un plan factoriel est une façon simple, mais efficace, de prendre en considération les deux sexes dans une seule expérience. Un plan semblable incorpore au moins deux facteurs, à deux niveaux chacun au moins, arrangés de telle façon que les unités expérimentales incorporent toutes les combinaisonsNote en bas de page 6.

Si nous reprenons l’exemple ci dessus, la taille totale de l’échantillon est de 20 animaux et le nombre de traitements est de 2. Toutefois, les animaux sont maintenant de deux sexes (c. à d. que « Sexe » est également un facteur à 2 niveaux). Dans cet exemple, le traitement peut être analysé de telle façon que la variation due au sexe est prise en compte dans la recherche d’un effet. Cela réduit le degré de variation inexpliquée dans le résultat (c. à d. les degrés de liberté dans l’élément « Erreur » de l’équation), et permet au chercheur d’examiner l’effet à la fois du sexe et du traitement sur n’importe quelle variable de résultat qu’il souhaite. Et surtout, le chercheur peut tester ce plan avec une analyse de variance bidirectionnelle pour évaluer les interactions entre ces deux facteursNote en bas de page 7.

Donc, l’équation suivante peut être utilisée pour représenter l’expérience, avec les degrés de liberté indiqués sous chaque partie :

Résultat = Traitement + Sexe + Traitement*Sexe + Erreur
  (20-1)            (2-1)          (2-1)              (1*1)                (16)

  Traités (n=10) Témoins (n=10)
Femelles (n=10) n=5 n=5
Mâles (n=10) n=5 n=5

Comparons cette dernière équation à celle du premier plan expérimental. Premièrement, les degrés de liberté de l’erreur ont diminué légèrement (passant de 18 à 16), ce qui signifie que la puissance sera moindre pour déceler les effets du traitement. Par contre, la réduction est minime, et la valeur des degrés de liberté de l’erreur est encore largement dans la plage acceptable (entre 10 et 20). À noter que si un chercheur voulait maintenir les degrés de liberté de l’erreur à 18 au moins parce qu’il a besoin de toute cette puissance pour déceler les effets du traitement, seulement quatre animaux de plus seraient nécessaires (cette valeur assure un plan équilibré – l’ajout d’un mâle et d’une femelle dans chaque groupe).

Deuxièmement, ce plan nous permet de tirer beaucoup plus d’informations globalement. En particulier, nous pouvons maintenant répondre aux trois questions suivantes :

  1. La variable de résultat diffère t elle entre les animaux traités et les animaux témoins?
  2. La variable de résultat diffère t elle entre les mâles et les femelles?
  3. Et surtout, le traitement a t il le même effet chez les mâles et les femelles?

Utiliser un plan factoriel permet au chercheur d’étudier statistiquement ces différences, ce qui n’est pas possible quand l’évaluation des effets chez les deux sexes est répartie sur deux expériences. Des inférences valides ne peuvent être tirées que si les deux sexes sont comparés directement, et non par une série de tests indépendantsNote en bas de page 4. De plus, parce que les plans factoriels combinent essentiellement des expériences (p. ex. une pour examiner un traitement médicamenteux chez les mâles, et une autre pour examiner le même traitement chez les femelles), ils demandent moins d’animaux qu’il en faudrait pour réaliser deux études distinctesNote en bas de page 1,Note en bas de page 7. Donc, dans cet exemple, toutes autres choses étant égales, de 20 à 24 animaux seulement sont nécessaires dans un plan factoriel, plutôt que dans deux plans distincts pour un sexe à la fois.

Les plans factoriels rendent possibles des comparaisons des différences entre les sexes avec le même nombre d’animaux que les études classiques chez un seul sexe.

Conclusion

L’exemple ci-dessus offre une validation de principe selon laquelle les deux sexes peuvent être inclus de façon efficiente et efficace dans un plan expérimental simple. Même si nombre d’expériences ne peuvent pas être organisées d’une manière aussi nette, les principes expliqués ici resteront valables. Un plan factoriel sera toujours plus efficace que des expériences séparées, pour ce qui est tant du nombre d’animaux utilisés que des informations obtenues. En réalité, le nombre d’animaux épargnés grâce à un plan factoriel dépendra de plusieurs facteurs, dont la taille initiale de l’échantillon, le nombre de niveaux de traitement, l’ampleur estimée de l’effet, la variance attendue entre sujets et la complexité de l’analyse (c. à d. le nombre d’autres facteurs inclus dans le modèle et la relation entre eux).

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