Les lauréats des Prix du pionnier 2023

Les Prix du pionnier de l'Institut de la santé publique et des populations (ISPP) des IRSC soutiennent des chercheurs en début, en milieu et en fin de carrière qui continuent de contribuer de façon exceptionnelle à la promotion de la santé publique et des populations au Canada et ailleurs dans le monde, par l'entremise de politiques de santé et d'interventions fondées sur des données probantes.

L'ISPP des IRSC est fier de présenter les lauréats de 2023 :

« Les Prix du pionnier sont remis à des membres du milieu de la recherche qui contribuent de façon exceptionnelle au domaine de la santé publique et des populations. Les lauréats de cette année en sont un parfait exemple.

C’est avec un immense plaisir que je félicite les lauréats des Prix du pionnier de l’ISPP des IRSC 2023 : Julio Montaner, Kate Storey et Travis Salway. En faisant preuve de leadership et d’un engagement ferme à collaborer et à favoriser l’équité en santé, chaque lauréat a non seulement accompli des réalisations exceptionnelles dans le milieu universitaire, mais a créé un impact durable dans les communautés auprès desquelles il travaille. »

Jennifer Gunning, directrice associée, ISPP

Chercheur chevronné : Julio Montaner

Le Dr Julio Montaner est professeur Killam (médecine) à l'Université de la Colombie-Britannique, directeur administratif et médecin en chef du Centre d'excellence de la Colombie-Britannique sur le VIH/sida, et chef de l'unité du VIH/sida à l'Hôpital St. Paul, Providence Health Care. Le Dr Montaner est bien connu pour son rôle de pionnier du traitement antirétroviral hautement actif (en anglais seulement) (TAHA, ou HAART (en anglais seulement)), qui s'est révélé particulièrement efficace pour prévenir le sida et les décès prématurés. La revue The Lancet l'a d'ailleurs surnommé le « King of HAART » (en anglais seulement) pour son travail dans ce domaine. En 2006, il a été le premier à affirmer que le TAHA freine également la transmission du VIH (en anglais seulement). Il a inventé l'expression « Treatment as Prevention » ou TasP (traitement comme prévention) pour exprimer le triple avantage du TAHA, soit arrêter : 1) la progression du sida, 2) les décès attribuables au SIDA, et 3) la transmission du VIH. Ses cibles 90-90-90 d'ici 2020 et 95-95-95 d'ici 2025 (en anglais seulement) [ PDF (641 Ko) - lien externe ] inspirées du TasP ont été officiellement approuvées par les Nations Unies en 2015 et 2021 respectivement en tant que stratégie mondiale pour « mettre fin à la pandémie de sida ». À présent, le Dr Montaner amplifie ses efforts pour adapter le TasP de manière à optimiser et à accélérer la lutte contre d'autres maladies contagieuses graves, y compris les maladies infectieuses – le VHC, par exemple –, ainsi que les maladies socialement contagieuses – le diabète de type II, la BPCO, la consommation d'opioïdes, par exemple –, dans le but ultime d'améliorer la viabilité des soins de santé.

Transcription

Bonjour, je m’appelle Julio Montaner. Je suis directeur du Centre d’excellence sur le VIH/sida à l’Hôpital St. Paul de Vancouver. Je suis également professeur Killam à la Faculté de médecine de l’Université de la Colombie-Britannique.

Je suis très heureux de me présenter devant vous aujourd’hui pour remercier chaleureusement les IRSC, et plus particulièrement l’Institut de la santé publique et des populations, de m’avoir décerné le Prix du pionnier de 2023.

Il y a une quarantaine d’années, une épidémie jusqu’alors inconnue a frappé nos côtes. Il s’agissait du VIH/sida. Nous ne savions pas comment nous en sortir, mais grâce à la recherche et à la mise en œuvre ciblée des résultats de notre recherche, nous avons pu annoncer au monde, en 1996, que notre nouvelle découverte d’un traitement à l’aide d’antirétroviraux hautement actifs allait changer radicalement le cours de l’épidémie sur le plan individuel. Elle pourrait mettre un terme à l’origine du sida et à la mort prématurée. En l’espace d’une décennie, nous nous sommes rendu compte, toujours selon nos recherches, qu’en traitant les personnes infectées par le VIH/sida, nous pouvions également les rendre non infectieuses, de sorte que nous pouvions commencer à freiner l’épidémie de manière rentable.

Nous avons ensuite élaboré une stratégie de traitement et de prévention, en partant du principe que si nous offrions un traitement, de la même façon, à toutes les personnes infectées par le VIH dans le monde, nous assisterions à la fin de la pandémie dans toutes les localités qui seraient en mesure de le faire.

Cette stratégie a mené aux cibles 90-90-90 et 95-95-95 qui ont maintenant été adoptées par les Nations Unies comme feuille de route pour l’élimination du VIH/sida à l’échelle mondiale en tant que préoccupation relative à une pandémie.

Nous sommes fiers de nos réalisations et nous remercions les IRSC et l’Institut de la santé publique et des populations pour cette reconnaissance. Merci beaucoup.

Chercheuse en milieu de carrière : Kate Storey

Professeure agrégée à l'École de santé publique de l'Université de l'Alberta, titulaire d'une chaire de recherche appliquée en santé publique de l'ASPC et des IRSC et chercheuse émérite à la Fondation de l'hôpital pour enfants Stollery, la Dre Kate Storey est également membre de l'Institut de recherche sur la santé de la mère et de l'enfant et scientifique au sein du Centre pour des communautés en santé, où elle dirige le projet de recherche Écoles en santé. Forte de son expérience dans les domaines de la recherche participative communautaire, de la santé en milieu scolaire et de la science de la mise en œuvre et adepte des approches qualitatives, elle a conçu un programme de recherche interventionnelle fondé sur le contexte d'une transformation du mode de vie et de l'environnement appelé SIRCLE (en anglais seulement). Axé sur des stratégies existantes en milieu communautaire et scolaire, ce programme novateur vise à améliorer le bien-être, à prévenir les maladies chroniques et à réduire les inégalités en santé par la promotion d'une culture du mieux-être chez les enfants, leur famille et leur collectivité qui repose sur des changements d'ordre systémique. L'équipe de la Dre Storey, reconnue pour la création de collectivités en santé, a mis en œuvre, évalué et mis à l'échelle des programmes sur les modes de vie sains dans des collectivités comprenant des milliers d'enfants, au Canada et à l'étranger, et établi des partenariats avec divers secteurs pour assurer leur pérennité. Son travail démontre que les interventions communautaires centrées sur les forces des collectivités et sur l'implication des jeunes améliorent efficacement les comportements liés à la santé, peuvent être déployées à grande échelle et permettent d'établir les conditions essentielles à leur mise en œuvre. Les travaux de la Dre Storey en la matière ont éclairé les politiques et les pratiques au Canada et sont à l'origine de l'établissement des Normes canadiennes des écoles en santé.

Transcription

Quel honneur incroyable! Je m’appelle Kate Storey et c’est avec humilité et reconnaissance que j’accepte le Prix du pionnier des IRSC depuis mon domicile d’Edmonton, en Alberta, dans le territoire visé par le traité no 6.

Je suis professeure agrégée, titulaire d’une chaire de recherche appliquée en santé publique des IRSC et chercheuse de haute distinction à la Fondation de l’hôpital pour enfants Stollery et à l’Institut de recherche sur la santé de la mère et de l’enfant. Je suis une scientifique passionnée, une ambassadrice de la santé des enfants et des jeunes et une fervente adepte de la course et du cyclisme, et mère de deux jeunes enfants qui me rappellent chaque jour que leur voix compte pour susciter le changement afin de favoriser la création de collectivités saines.

Je dirige le laboratoire de recherche SIRCLE, lequel offre et évalue des programmes de vie saine en milieu scolaire partout au Canada et à l’étranger. Ensemble, notre équipe a éclairé la façon dont les communautés scolaires mettent en œuvre des interventions en santé de la population pour réduire les inégalités en matière de santé. Les milieux dans lesquels nous vivons, travaillons, apprenons et jouons façonnent notre santé et notre bien-être. Il est indispensable que ces milieux soient favorables et inclusifs pour que tout le monde puisse en profiter.

Notre travail a permis d’orienter les interventions non plus sur les comportements individuels liés à la santé, mais sur des approches adaptées aux contextes, qui s’appuient sur les forces des collectivités et s’attaquent aux déterminants plus généraux de la santé. Nous savons qu’il ne suffit pas de dire aux gens de manger sainement, d’être actifs, de bien dormir, de cesser de fumer ou de faire preuve d’attention pour faciliter l’adoption d’un mode de vie sain.

Nous créons plutôt une culture du mieux-être pour les enfants, leur famille et leur collectivité grâce à des changements à l’échelle du système. Il s’agit de créer des lieux et des espaces où des enfants en bonne santé vivent dans des collectivités saines et où tous les enfants et les jeunes ont des chances égales de grandir et de s’épanouir, et de savoir que leur voix compte.

C’est de façon délibérée que j’ai choisi de situer mon programme de recherche principalement dans un contexte scolaire. Les écoles sont des lieux privilégiés pour édifier des collectivités saines, car elles touchent presque tous les enfants pendant les années cruciales de leur développement, surtout que la santé est une condition indispensable de l’apprentissage. Les écoles sont également des centres communautaires, en lien direct avec le domicile et la collectivité, et offrent une approche inclusive de la santé de la population. Les projets du laboratoire SIRCLE sont variés, mais sont tous axés sur les principes fondamentaux de l’équité et de la voix des jeunes. Nous cherchons à comprendre ceux qui ne sont pas représentés, et nous travaillons avec les jeunes pour concevoir conjointement des stratégies de promotion de la santé. L’approche scientifique que nous adoptons est celle de la mise en œuvre, et nous utilisons des méthodes novatrices combinées qui s’inscrivent dans le cadre de la recherche participative axée sur la collectivité. Il s’agit notamment d’approches fondées sur les arts, comme la méthode Photovoix, les entretiens in situ, les cercles de partage et de discussion, ainsi que l’analyse des réseaux sociaux.

J’ai grandement tiré profit d’un mentorat extraordinaire, et ma conviction est que l’influence que j’ai ne peut être obtenue que par la formation de la prochaine génération de scientifiques. Pour moi, le mentorat signifie s’efforcer constamment d’élargir ses connaissances, ses compétences et sa vision du monde. Mon objectif est de demeurer réflexive, d’évoluer et de repousser mes limites en permanence.

La recherche est relationnelle, et le travail que je mène est fondé sur des partenariats avec des équipes étroitement cohésives. Ces relations sont la partie la plus importante de mon travail. Que signifie donc ce prix? À mes yeux, celui-ci reconnaît que la recherche en santé utile, percutante et équitable est une affaire de collectivité, de liens, de gratitude, de passion et, surtout, de vulnérabilité et de croissance. C’est pour moi un honneur d’être nommée pionnière des IRSC.

Merci.

Chercheur en début de carrière : Travis Salway

Le Dr Travis Salway (il, lui) est spécialiste de l'épidémiologie sociale et s'efforce de comprendre et d'améliorer la santé des populations bispirituelles, lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres et queers (LGBTQ2). Depuis 2019, le Dr Salway est professeur adjoint à la Faculté des sciences de la santé de l'Université Simon-Fraser et est affilié à titre de chercheur au BC Centre for Disease Control et au Centre for Gender and Sexual Health Equity. En 2019 et 2020, il a témoigné devant deux comités permanents de la Chambre des communes du Canada afin d'éclairer la politique fédérale visant à promouvoir l'équité en santé pour les populations LGBTQ2. Ces démarches ont mené à l'adoption du projet de loi C-4, qui criminalise les pratiques anti-LGBTQ2, également connues sous le nom de « thérapies de conversion ». Le Dr Salway dirige REAFFIRM Collaborative, une équipe de recherche interdisciplinaire sur la santé des populations 2LGBTQ+, et collabore au Two-Spirit Dry Lab, le premier groupe de recherche de l'Île de la Tortue exclusivement voué à la compréhension de la santé des personnes bispirituelles autochtones. Il est le fondateur de MindMapBC (en anglais seulement), un outil de recherche de services de santé mentale pour les populations LGBTQ2.

Transcription

Je m’appelle Travis Salway. Je suis professeur adjoint à la Faculté des sciences de la santé de l’Université Simon Fraser, où je travaille en collaboration avec le Centre de contrôle des maladies de la Colombie-Britannique et le Centre pour l’équité en matière de genre et de santé sexuelle. Je suis reconnaissant et honoré de recevoir le Prix du pionnier pour chercheur en début de carrière de l’Institut de la santé publique et des populations des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), et je tiens à accepter ce prix au nom de toute mon équipe de recherche et de mes collaboratrices et collaborateurs à l’Université Simon Fraser. Notre équipe de recherche s’intéresse aux identités des personnes bispirituelles, lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres et queers (2LGBTQ). Nous essayons de comprendre les contextes dans lesquels ces identités sont rendues visibles, où ces identités sont affirmées, voire célébrées, et nous tentons de comprendre comment l’affirmation de ces identités influe sur la santé de la population 2LGBTQ. Comme la recherche est renforcée par les points de vue de ceux qui ont une expérience concrète, j’ai demandé à certaines personnes de la population étudiante avec lesquelles je travaille de répondre à la question suivante : « Pourquoi est-il important d’accroître la visibilité des personnes bispirituelles et LGBTQ dans la recherche en santé publique? »

Ren Lo : L’équité en santé est un principe fondamental de la santé publique et la recherche qui tient compte de la diversité des personnes queers et transgenres fait progresser cet objectif. Les personnes bispirituelles, transgenres et non binaires ont des identités et des expériences intersectionnelles et culturelles uniques. Ces personnes méritent d’être appuyées, affirmées et reconnues. Les personnes bispirituelles, transgenres et non binaires sont sous-représentées dans l’ensemble de la recherche en général, et le fait d’accroître leur visibilité nous permettra d’acquérir les connaissances dont nous avons besoin pour soutenir leur santé. Alors que les mouvements de libération des personnes transgenres se poursuivent, il est important que la recherche rende compte de leur réalité et des possibilités qui s’offrent à elles.

Martha Gumprich : Une plus grande visibilité à l’égard des personnes non binaires dans le milieu de la recherche en santé publique se traduira par un plus grand nombre de personnes de la cohorte étudiante qui auront l’impression qu’une place leur a été réservée. Comme Marian Wright Edelman l’a dit un jour, « on ne peut pas être ce que l’on ne voit pas ». En outre, le fait de côtoyer du personnel non binaire de la communauté de la recherche me donne l’impression qu’une place me revient, qu’un avenir m’attend dans ce domaine et que, lorsque j’entre dans une salle, je sais que quelqu’un comprendra mes expériences, ce qui n’est pas le cas des personnes cis[genres].

Milo Ira : La raison pour laquelle il est important d’accroître la visibilité des personnes bispirituelles, transgenres et non binaires dans les soins de santé est que, du fait de cette visibilité accrue, nous avons aujourd’hui de plus grands besoins en matière de soins de santé et que nous sommes dans une position où – en raison de notre invisibilité sur le plan des soins de santé – nous devenons des patients à part entière et, comme nous avons dû apprendre à nous organiser et à défendre nos intérêts avec les ressources dont nous disposons, nous constituons désormais une précieuse ressource et une grande source du savoir pour contribuer à l’amélioration de la santé des personnes bispirituelles, transgenres et non binaires.

Harlan Pruden : À titre d’organisateur de la communauté bispirituelle, je ne peux imaginer une personne plus compétente et méritante que Travis. Ce dont j’aimerais vous faire part pendant le peu de temps que nous avons passé ensemble, c’est de ce que Travis vous apportera. Je ne vois pas de meilleure personne pour agir comme ambassadeur et pour voir son nom soit associé au sien. Lorsque Travis s’engage, il le fait avec son cœur et avec un sens de la curiosité qui le rend si incroyablement beau et un ambassadeur de l’humanité si extraordinaire.

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